DAOUD Kamel

Algérie

14 septembre 2021.

Chroniqueur engagé, journaliste et écrivain talentueux, Kamel Daoud est une figure publique algérienne dont la plume suscite de nombreuses réactions parmi ses lecteurs : son discours sur l’Islam dérange car il en condamne les travers de façon cinglante, sans détour. Il se fait notamment connaître avec son premier roman, Meursault, contre-enquête récompensé, entre autres, par le Prix des 5 continents de la francophonie et le Prix Goncourt du premier roman 2015. Fruit d’une nuit passée seul au musée Picasso de Paris, son dernier livre est une ode à l’oeuvre du peintre cubiste, et plus particulièrement sa dimension érotique. Une immersion fascinante dans le monde de l’artiste, qui questionne notre rapport au corps et au désir.

« La langue française n’est pas une langue mais une vaste baie ouverte pour moi. Je l’oublie car je la parle et j’y écris ce que je vis et rêve. Ce n’est pas une langue mais une étrange conversation que j’écoute dans ma tête. » (APF)

 

Né en 1970 à Mostaganem, il fait des études de littérature puis à partir de 1994, rédige des chroniques pour le Quotidien d’Oran, le premier journal francophone algérien. Il joue un rôle important dans le combat contre le pouvoir en place dans les années 2000. Ses écrits littéraires ouvrent les portes de mondes imaginaires sombres et loufoques. En 2002, La Fable du Nain explore le thème de l’aliénation et de la folie : un narrateur, après un séjour mystérieux dans "une grotte" qui s’apparente à un centre hospitalier, se bat contre une personnalité diabolique, le "Nain", qui tente de s’emparer de lui. Dans Ô Pharaon, publié en 2005, il invente l’histoire d’un maire imaginaire qui a amassé une fortune considérable grâce à de multiples combines. L’écrivain a été lauréat du prix Mohammed Dib en 2008 pour L’Arabe et le vaste pays de ô.

Dans Meursault, contre-enquête (Actes Sud, 2014), il rend hommage à Albert Camus en répondant à l’une de ses œuvres majeures, L’Étranger, et fait de la figure de l’Arabe son personnage principal, figure à laquelle seule une fiction peut donner un nom, un visage, une histoire et lui rendre sa légitime complexité. Un moyen d’équilibrer le procès de Meursault, et donc d’interroger l’Histoire, en interrogeant les héritages, les mythes, la foi comme constituants de l’identité d’un peuple ou d’un individu, et de défendre la liberté d’imaginer et de questionner.

Cible de critiques virulentes et de menaces pendant la polémique sur la nuit de Cologne, Kamel Daoud se retire du journalisme en 2016 pour mieux se consacrer à la littérature. Ses positions sur l’Islam dérangent et son jugées blasphématoires en Algérie comme en Occident. On l’accuse d’alimenter l’islamophobie ambiante et d’adopter un point de vue emprunt de "paternalisme colonial » concernant la sexualité musulmane qu’il qualifie de "pathologique". (Le Monde)

Son style cinglant et original se met au service d’une réflection sur l’actualité et l’Histoire et des conclusions qui en ont été tirées. Cette rhéthorique de la remise en question est au centre de Mes Indépendances, un recueil de chroniques publiées dans la presse algérienne et internationale entre 2010 et 2016.


Bibliographie

 

DERNIER OUVRAGE

 

Le peintre dévorant la femme

Stock - 2018

Invité à passer une nuit dans le musée Picasso à Paris, un octobre au ciel mauvais pour le Méditerranéen que je suis. Une nuit, seul, en enfant gâté mais en témoin d’une confrontation possible, désirée, concoctée. J’appréhendais l’ennui cependant, ou l’impuissance.
Pour comprendre Picasso, il faut être un enfant du vers, pas du verset. Venir de cette culture-là, sous la pierre de ce palais du sel, dans ce musée, pas d’une autre. Pourtant la nuit fut pleine de révélations : sur le meurtre qui peut être au coeur de l’amour, sur ce cannibalisme passionné auquel l’orgasme sursoit, sur les miens face à l’image et le temps, sur l’attentat absolu, sur Picasso et son désespoir érotique. »