Va à l’étranger comme chez ton ami
et chez ton ami comme à l’étranger
Être cultivé aujourd’hui, ce n’est pas lire Tacite ou Homère dans le
texte (cela c’est de l’érudition), ce n’est pas non plus connaître par
coeur les composantes chimiques du sol de Mars ou de Saturne, c’est
tout simplement admettre - jusqu’en sa propre création - la culture
des autres ; c’est même au besoin se mêler à elle et la mêler en soi.
Être cultivé aujourd’hui, c’est porter en soi, à sa mort, des mondes
plus nombreux que ceux de sa naissance. Être cultivé aujourd’hui,
c’est être tissé, métissé par la culture des autres.
Même si les autres sont en guerre avec nous. C’est moi qui rajoute
cette phrase aux mots de Jacques Lacarrière. Je les fais miens dans ce
besoin de poème 2016 qui accueille cette année des voix venues de
pays dont les états ou les peuples sont toujours en guerre : Israël (Tal
Nitzan) et le Liban (Hyam Yared), les Kurdes (Seyhmus Dagtekin) et les
Turcs (Nedim Gursel), dont les espoirs sont immenses comme en Iran
(Roja Chamankar), en Bosnie (Maya Ombasic), en Haïti (Lyonel Trouillot,
Inema Jeudi, Mehdi Chalmers). Des voix qui disent ou chantent
malgré tout : Anise Koltz, même si, comme elle l’écrit, rien n’est plus
obscur que la clarté. Et c’est le cas pour tous les autres invités de ces
temps de poème : Joël Vernet, Christine Jordis, Atiq Rahimi, Kim Thuy,
Thierry Renard, Sylvia Lacarrière, Emmanuel Damon, Alain Gorius,
Eugène Nicole et Jean Luc Tamby.
Yvon Le Men
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