Coup de cœur Télérama : Jamal Mahjoub (Soudan)

Un cosmopolite en quête d’identité
Jamal Mahjoub © Sophie Bassouls/Corbis-sygma

« Je suis écrivain africain, écrivain arabe, écrivain anglais. Je suis multiple, je suis trois. Cohérence mais aussi concurrence. Parfois, j’envie l’auteur qui n’est que d’un seul pays, que d’une seule langue. » Jamal Mahjoub, un rien réservé, un rien mélancolique, s’exprime en français - mais il a séjourné au Danemark et vit aujourd’hui en Espagne. Ce cosmopolite multilingue est né à Londres (ses parents y travaillaient) et a été élevé au Soudan. Le Soudan, immense pays de l’est africain, en conflit perpétuel, fracturé en deux : arabe et musulman au nord, chrétien et animiste au sud.
Jamal Mahjoub, nourri de littérature dès son plus jeune âge - sa mère était férue de fictions, son père d’essais - sut à treize ans qu’il serait écrivain. il rassure ses parents inquiets en suivant des études scientifiques, devient géologue, n’exercera jamais, multiplie les boulots (coursier, cuisinier, bibliothécaire, chef marketing dans une banque, journaliste, etc) et écrit, dans une unique langue : l’anglais, qu’il enrichit de consonances et de rythmes qui lui sont propres, qui viennent de tous ses ailleurs, tel un Salman Rushdie, un Hanif Kureishi… Ses livres, à chemin entre roman historique et roman autobiographique, traquent l’histoire de son pays, le Soudan et sa propre quête d’identité. Jamal Mahjoub ennivre son écriture de visions poétiques, de métaphores cruelles : certains peuples sont-ils condamnés à s’entre-tuer ?
Martine Laval