Invités depuis 1990

KURNIAWAN Eka

Indonésie

Les Belles de Halimunda (Sabine Wespieser Editeur, 2017)

© Paula Pedemonte_Pontas Agency

Souvent comparé à son compatriote Pramoedy Ananta Toer, ou bien à Salman Rushdie et Gabriel Garcia Marquez, pour le réalisme magique qui imprègne ses romans, Eka Kurniawan est le nouveau grand nom de la littérature indonésienne. Romancier et journaliste engagé, son style est imprégné de la parole populaire et des traditions indonésiennes. Entre conte fantastique et réalisme cru, Les Belles de Halimunda, son premier roman, retrace l’histoire d’une lignée de femmes maudites et révoltées, dans l’Indonésie aux prises avec la colonisation hollandaise, l’occupation japonaise puis la dictature.

Eka Kurniawan est le nouveau grand nom de la littérature indonésienne, donné comme successeur de Pramoedy Ananta Toer, l’écrivain dissident mort en 2006. Inspiré par les contes de sa grand-mère et les livres abandonnés par les touristes que son père ramenait à la maison, il commence à écrire à l’âge de 11 ans. En découvrant, sur les bancs de l’université, le massacre de 1965, il prend conscience de toute l’histoire cachée de son pays ; il rencontre alors Pramoedy Ananta Toer et devient, comme lui, romancier, activiste et journaliste.
La comparaison entre les deux hommes s’arrête là : le regard d’Eka Kurniawan sur l’Indonésie n’appartient qu’à lui, tout comme son style. Il explique : « Une chose que j’avais en tête, c’était d’écrire d’une manière qui me correspondait, j’avais envie d’utiliser une langue du quotidien, des dialectes, leur associer des traditions de la culture indonésienne. » (France Culture). En 2015, Sabine Wespieser publie L’Homme-Tigre, une enquête psychologique sur les raisons qui poussent à commettre un meurtre, inspirée d’un mythe javanais.

Les Belles de Halimunda, dont la traduction française est sortie en 2017, est en réalité son premier roman. Dans un style à la fois lyrique et truculent, Eka Kurniawan nous montre une lignée de femmes de caractère, dont la beauté fait leur malheur. C’est une histoire de mythes et de fantôme, où les jeunes filles s’envolent et les esprits apprennent la lecture aux enfants. C’est aussi un roman d’un réalisme cru, retraçant les souffrances de femmes prostituées ou bien mal aimées, prises au piège dans la douloureuse histoire de l’Indonésie. Le résultat de ce savant mélange est un roman passionnant et très drôle, véritable coup de maître.


Bibliographie

  • Les Belles de Halimunda (Sabine Wespieser Editeur, 2017)
  • L’Homme-Tigre (Sabine Wespieser Editeur, 2015)
Les Belles de Halimunda

Les Belles de Halimunda

Sabine Wespieser Editeur - 2017

Fondée par une princesse à la beauté fatale, Halimunda est une ville imaginaire de la côte sud de Java. Eka Kurniawan y déploie l’histoire d’une lignée de femmes marquée par une malédiction dont l’origine remonte à la fin de l’occupation néerlandaise.
Le livre s’ouvre au moment où Dewi Ayu, la prostituée la plus célèbre de la ville, sort de sa tombe vingt et un ans après sa mort. Couverte de son linceul, sa très longue chevelure flottant au vent, elle traverse Halimunda pour rentrer chez elle. Dans la véranda est assise une jeune fille d’une insoutenable laideur. Dewi Ayu comprend que son vœu a été exaucé : épouvantée par la succession de catastrophes qui s’étaient abattues sur ses trois filles aînées, aussi séduisantes que leur mère, sur leurs familles et sur la région entière, elle avait tout mis en œuvre pour que la quatrième fût laide. La repoussante jeune femme reçoit pourtant la nuit les visites d’un mystérieux prince charmant.
L’identité du visiteur nocturne, et la raison pour laquelle Dewi Ayu est revenue parmi les vivants, seront élucidées à la faveur d’une époustouflante plongée dans le passé. La difficile conquête de l’indépendance, les massacres des communistes en 1965 et la dictature de Soeharto constituent la toile de fond de cette tragédie de la vengeance où destinées individuelles et collectives sont intimement liées.
Alternant réalisme historique et figures légendaires, convoquant à loisir spectres et esprits, passant de l’émotion la plus pure à un humour ravageur, de l’idylle romantique à la violence la plus crue, Eka Kurniawan impressionne par la diversité de ses registres. Et la maîtrise narrative avec laquelle il mène au pas de charge son lecteur éberlué vers le dénouement l’inscrit d’emblée parmi les grandes voix de la littérature mondiale.

Traduit de l’indonésien par Etienne Naveau.


Revue de presse

  • "Surréel et débridé, torride et foisonnant, totalement hors norme et délicieusement déroutant" (Le Monde)
  • "Les Belles de Halimunda cultivent la fantaisie débridée des Mille et Une Nuits et du Mahabharata transposés dans l’époque contemporaine." (Les Echos)
  • "Des tragédies qu’Eka Kurniawan raconte dans une langue fertile, irriguée de dialecte, où la poésie côtoie la crudité, le lyrisme la trivialité, l’humour toujours à l’affût." (La Croix)
L'Homme-Tigre

L’Homme-Tigre

Sabine Wespieser Editeur - 2015

Quand, à la fin du premier chapitre de ce roman impeccablement construit, les autorités demandent à Margio, de toute évidence coupable du meurtre d’Anwar Sadat, pourquoi il a sauvagement assassiné ce notable, il répond : « Ce n’est pas moi, il y a un tigre dans mon corps. »
Ce tigre, « blanc comme un cygne, cruel comme un chien féroce », lui vient de son grand-père. Si, à diverses occasions, il l’a senti pénétrer dans son corps, il a toujours tenté de le réfréner. Personnage à part entière de ce drame qui plonge ses racines dans les croyances animistes, le tigre ne jaillira qu’au moment où le jeune homme ne pourra plus contenir la colère qu’il réprime.
Pour élucider les raisons du meurtre, Eka Kurniawan revient sur le passé de Margio. Rien en effet dans la vie de l’inoffensif Anwar Sadat ne laissait présager une fin aussi violente : peintre amateur, il vivait aux crochets de sa riche épouse, et employait ses heures d’oisiveté à jouer aux échecs, regarder des matches de football et courir les femmes.
Avant que le père de Margio ne se décide à exercer en ville son métier de coiffeur, sa petite famille vivait paisiblement au cœur de la campagne indonésienne. L’arrivée dans la maison des faubourgs marque pour Nuraeni, la mère de Margio, le début de la désillusion. Et, pour Margio, celui de la révolte. Au fil des années et de la mésentente entre ses parents, la colère va croître en lui, envahissant tout, comme les plantes que Nuraeni cultive sur leur misérable lopin de terre. Leur foyer devient une jungle étouffante, à laquelle cette femme, encore jeune et belle, essaye d’échapper en allant effectuer des travaux domestiques chez d’autres. Notamment dans la demeure d’Anwar Sadat…
Dès lors se nouent les fils de la tragédie qui va irrémédiablement lier la destinée des deux familles, et provoquer le surgissement du tigre blanc.

Traduit de l’indonésien par Etienne Naveau.


Revue de presse

  • "Proie, instinct, pulsions, baiser mortel, morceaux de chair arrachés, chasse : c’est le côté volontairement primitif et brutal de la prose de Kurniawan, allié à la finesse des notations, à la poésie des images et aux odeurs, qui fait de cet Homme-Tigre un livre à part. Profondément troublant." (Florence Noiville, Le Monde des livres)
  • "Il y a de la fable et du conte dans ce roman, du terre à terre et du mystique, un mélange subtil et réussi entre une histoire qui vous berce, et une sauvagerie qui vous fascine… Méfiez-vous des félins qui dorment !"
    (Hélène Woodhouse, librairie Le Bateau Livre, Lille - Page des libraires)

Rebelles

Les cafés littéraires en vidéo
Avec : Lola LAFON, Kossi EFOUI, Kettly MARS, Eka KURNIAWAN - Saint-Malo 2018

Avec : Lola LAFON, Kossi EFOUI, Kettly MARS, Eka KURNIAWAN
Animé par Maëtte CHANTREL et Michel ABESCAT

Romanciers de la mémoire

Avec Yahia Belaskri, Jean-Marie Blas de Roblès, Eka Kurniawan et Michel Le Bris - Saint-Malo 2018

Avec Yahia Belaskri, Jean-Marie Blas de Roblès, Eka Kurniawan traduit par Nathalie Wirja, et Michel Le Bris. Animé par Yann Nicol.


Le tragique du monde

Avec David Vann, Eka Kurniawan, Kossi Efoui et Kettly Mars - Saint-Malo 2018

Avec David Vann (traduit par Sophie Aslanidès), Eka Kurniawan (traduit par Nathalie Wirja), Kossi Efoui et Kettly Mars
Animé par Claudine Glot