L’affaire Mouron

écrit par Martin Plessy, élève de 5ème au collège Fénelon à Grasse (académie de Nice)

Corentin s’étonne de n’être pas plus impressionné. Remarquez, il ne s’est jamais évanoui de sa vie. Mais il n’a jamais rencontré de cadavre non plus. Monsieur Mouron est étendu dans toute sa rondeur. Il porte son
costume trois pièces et son éternel nœud papillon. Ce gros dandy cachait ses bourrelets sous des vêtements impeccables. Par terre, tas flasque comme une flaque de boue, il a l’air paisible. Son rictus s’est transformé
en sourire d’ange grassouillet. Chacune de ses cuisses est un tronc d’arbre Cette masse est couverte d’un sang qui coule encore. Une aiguille de métronome en plein coeur, quelle fin horrible pour un prof de solfège.
Corentin n’est pas attendri par cet ancien ennemi qui ne respire plus, mais s’il l’a maintes fois maudit il na jamais souhaité sa mort. M.Mouron abusait de son pouvoir et se servait du solfège comme d’un instrument
de torture. Mais qui en voulait à ce point au prof sadique ? Combien de fois a-t-il poussé Célia la violoncelliste aux larmes ? Et la petite Natacha, n’a-t-elle pas juré que si elle le rencontrait une nuit de pleine lune elle lui enfoncerait
sa flûte dans la gorge ? Et Guillaume, si sublime au piano, garçon massif et fort qui s’est écroulé après avoir raté l’examen de fin d’année en hurlant : "Qu’il crève !". Mouron était aussi détesté par ses collègues du conservatoire. Mais nul ne le haïssait autant que la belle directrice, Madame Van den Blois, qui n’attendait que la retraite de ce croque-note. L’a-t-elle hâtée ? Et si oui pourquoi ? Personne ne connaît le moindre détail de sa vie, mais avec
l’arrivée de la police, on ne va pas tarder à être servi.

Lorsque la police fut sur place, le périmètre fut sécurisé et le commissaire inspecta les lieux. Il connaissait bien M.Mouron puisqu’il avait déjà enquêté sur l’affaire « Cambriolage chez les MOURON ».
Célia, elle, ne regrettera pas vraiment M.Mouron : « Les Mouron mourront » était sa devise.
Natacha, de son côté, s’en voulait de ne pas l’avoir tué elle-même et Guillaume la soutenait.

L’enquête ne progressait pas vite mais Mme Van den Blois avait été mise en garde à vue et semblait bien heureuse que ce meurtre ait été commis et elle le laissait transparaître.
Cinq jours plus tard, Mme Mouron était retrouvée morte, asphyxiée dans une boîte à contrebasse.
Depuis ce jour fatidique, Corentin décida de mener sa propre enquête. Parallèlement, le maire du village imposa un couvre-feu et fit installer des panneaux sur lesquels était inscrit :

« APRÈS LES MEURTRES EN SÉRIE QUI ONT RAVAGÉ NOTRE COMMUNE, LE PORT DE DEUX COUTEAUX ET D’UN PISTOLET EST DÉSORMAIS OBLIGATOIRE ».

Tous les habitants se barricadèrent chez eux. Certains allèrent même jusqu’à faire poser de grandes planches d’étain sur leurs fenêtres pour éviter les intrusions.
Corentin non plus ne progressait pas jusqu’à ce qu’il voit le tueur de ses propres yeux. C’était un homme costaud et assez petit : un atout idéal pour s’enfuir rapidement et sans être vu après avoir commis un crime.
Corentin n’eut pas le temps de se cacher que, déjà, le criminel le repérait. A la vue de Corentin ce dernier s’enfuit sur le toit d’une petite maison.
Corentin le suivit et, arrivé en haut, ils se battirent. Le combat tourna au désavantage de Corentin qui chuta du toit.
Il tomba sur une barre d’étain qui lui déchiqueta la jambe. La chair à vif, Corentin tomba dans les pommes. Lorsqu’il se réveilla, il était allongé dans un lit d’hôpital et souffrait terriblement.

L’enquête dura des mois et des mois, la ville était de plus en plus inquiète depuis que Corentin avait frôlé la mort. La police pensa d’abord que Célia, Natacha et Guillaume avaient tué M. et Mme Mouron. Mais cette hypothèse fut écartée car les empreintes prélevées sur l’arme du crime n’étaient pas les leurs. Et puis le commissaire Gontran disparut. La police fit des recherches pour comprendre cette mystérieuse disparition…

On finit par découvrir que le commissaire était l’assassin ! Il avait tué M. et Mme Mouron et avait tenté de brouiller les pistes pour ne pas être découvert mais en vain.
Le commissaire Gontran était à présent recherché pour meurtres en série et des panneaux de recherche affichaient dans toute la France : « LA POLICE RECHERCHE UN HOMME DE TAILLE MOYENNE ; IL EST SUREMENT ARMÉ. FAITES ATTENTION, IL EST TRÈS DANGEREUX. » Ou parfois : « RECHERCHE UN HOMME DE TAILLE MOYENNE, CHEVEUX BRUNS, YEUX BLEUS, VESTE NOIRE .. »

Le commissaire Gontran fut interpellé en Espagne ; il espérait s’enfuir en Amérique Latine mais voyagea finalement vers une cellule de prison hautement sécurisée.
Aux funérailles de M. et Mme Mouron, personne ne pleura, Guillaume cracha même sur sa tombe ! C’était la fête chez les Van den Blois ; on y sortit le champagne.

Au final, quatre personnes étaient mortes :

_Monsieur Mouron : transpercé par une aiguille de métronome

_Madame Mouron : asphyxiée dans une boîte de contrebasse

_Le commissaire Gontran qui s’était pendu avec les spaghettis de son dîner à la prison

_Corentin, malheureusement terrassé par la gangrène puis achevé par une hémorragie interne au foie.