RENCONTRES ET DÉBATS

Sport et littérature

Sport et littérature ont depuis toujours partie liée – il suffit de considérer la liste, très longue, des romanciers qui ont marqué par des œuvres leur fascination. Les mots du sport eux-mêmes sont parlants : « dieux du stade », nécessité de se « transcender ». Comme si, dans le sport, se rejouait ce qui était au cœur de la tragédie grecque : la mise en scène du génie créateur, la coincidence-opposition de la liberté et du destin, de l’individu et du groupe, le défi à l’ordre établi des choses. Pour en dire plus, Benoît Heimerman, écrivain, ancien de l’Équipe Magazine, éditeur chez Stock, président de l’Association des écrivains sportifs, qui propose une jubilatoire anthologie des chroniques sportives de Tristan Bernard (Le marquis des stades, Le Castor Astral) ; Bernard Chambaz signe un magnifique livre sur le destin tragique d’Ayrton Senna (À tombeau ouvert, Stock), Élie Robert-Nicoud réussit un livre dont nous prenons le pari qu’il deviendra un classique sur la boxe (Scènes de boxe, Stock), comme Jours barbares (Les éditions du Sous-Sol) de William Finnegan l’est déjà sur le surf, par la manière dont il dit à travers lui le tragique et la beauté du monde.

  • Lundi 14h30, Hôtel de l’Univers

Creative non-fiction

Que signifie exactement ce mot qui devient à la mode ? Une interrogation sur la capacité de la littérature à dire l’inconnu du monde – ou, autrement formulé, qu’est-ce qui fait d’un livre relevant du « travel writing » une œuvre littéraire, à la différence du simple reportage ? Michel Le Bris avait édité en 1992 John Mc Phee, grande figure de ce courant, célèbre aussi pour son enseignement à Princeton, qui a eu tant d’influence sur le New Yorker. Pour évoquer ce courant littéraire, de plus en plus vivant, Michael Paterniti qui signe un modèle du genre (La chambre à récits : passion, meurtre et fromage dans un village d’Espagne (Noir sur blanc), Stéphane Breton, ethnologue dont la démarche en matière de cinéma nous paraît comparable, William Finnegan, pilier du New Yorker, prix Pulitzer pour Jours barbares, (Les éditions du sous-sol), Hubert Delahaye dont les Lettres d’Ogura (L’Asiathèque) dressent un portrait intimiste du Japon et Adrien Bosc (Revue Feuilleton).

  • Samedi 15h45, Salle Maupertuis

Difficile liberté

Vive la liberté, quand chutent les idéologies ? C’est vite dit : il y a aussi cette sensation de vide, quand vos sécurités, aussi faibles qu’elles aient pu être, s’effondrent, et vos cadres mentaux avec elles. Le jeune pickpocket qui décide de voler la tête de Lénine, dans le mausolée de la place Rouge, dans le roman de Nicolas Bokov (La Tête de Lénine, Noir sur blanc) est loin de se douter de ce qu’il va ainsi déclencher. Christoph Hein, grandi en ex-RDA, dit le désarroi du vide créé dans Le Noyau blanc (Métaillé) quand son héros ne parvient pas à comprendre les nouvelles règles du jeu, où tout idéal paraît exclu. Mais peut-on vivre sans idéal ? L’enfant terrible des lettres chèques, Jaroslav Rudis qui n’aime rien tant que de nous passer à la paille de fer, nous plonge dans l’univers de laissés pour compte fascinés par le populisme et les idéologies totalitaires (Avenue nationale, le Mirobole). La fille de la peur (Actes Sud) d’Alex Berg, la reine du polar allemand, a pour toile de fond le jihad et les effets de la radicalisation des jeunes. Et Gérard Mordillat, fin analyste du fascisme (Le fascisme de Mussolini, Démopolis) imagine l’arrivée au pouvoir d’une présidente d’extrême droite (Moi, présidente, Autrement).

  • Lundi 15h45, Salle Maupertuis

Orient-Occident : rêve impossible ?

Cette union, ce dialogue, furent le rêve eurasien d’Alexandre le Grand. Comment se peut-il que ce territoire coïncide avec, aujourd’hui, la zone d’extension du djihadisme ? s’interroge Jean-Pierre Perrin dans un essai-récit de voyage, prix Kessel de cette année (Le Djihad contre le rêve d’Alexandre, Le Seuil), Tahar Ben Jelloun, tenant résolu d’un Islam des Lumières est comme un pont exemplaire entre les deux continents, et a multiplié les ouvrages sur ce thème, Olivier Weber, grand reporter, a arpenté cet espace en tout sens, fait de ce face à face la matière de plusieurs de ses livres, et dans son dernier roman, Hakan Gunday, le nouveau grand des lettres turques, a pour personnage central, qui prend une dimension symbolique sur le rapport Orient-Occident, un jeune passeur turc tout à la fois tortionnaire et victime (Encore, Galaade). Un rêve véritablement impossible ? Ou bien impose-t-il, aussi, une interrogation de l’Occident sur lui-même ?

  • Lundi 10h, Salle Maupertuis

Un monde sauvage

Rude est le monde des îles Farallon, tel que nous le décrit Abby Geni dans son fascinant roman (Farallon Island, Actes Sud), inhabité, balayé par les tempêtes, les vents violents, théâtre d’une guerre pour la survie de toutes les espèces, qui rejette avec violence toute présence humaine. Pour ne rien dire de celui de Ian McGuire Dans les eaux du Grand Nord (10/18 grand format) plongée hallucinée dans « l’effroi de la glace et des ténèbres » qui balaie bien vite les poses civilisées. La nature comme une puissance aveugle de destruction. De création aussi – comme le montrent Jean Hegland (Dans la forêt, Gallmeister), roman d’enfants perdus dans un monde effondré où ils auront à apprendre à survivre, au cœur de la forêt, et Marcus Malte (Le Garçon, Zulma) campant un garçon sauvage, sans nom, ne parlant pas, qui aura à découvrir la civilisation – et la violence des hommes, les ravages de la guerre. Car si la nature est aveugle dans ses destructions, nous y ajoutons pour le meilleur et pour le pire une arme redoutable : l’imagination.

  • Samedi, 14h,ENSM

La révolution anti-abolitionniste

L’ouvrage d’Olivier Grenouilleau Les traites négrières (Gallimard 2004) avait déclenché de violentes polémiques, pour l’essentiel infondées, mais qui montraient qu’il touchait à des blessures encore à vif – comme si le temps de l’histoire, et de son langage, n’était pas encore venu. Il poursuit son œuvre, par un deuxième livre, monumental, essai d’histoire globale, La révolution abolitionniste (Gallimard 2017). Si l’esclavage, nulle part, n’est jamais allé de soi, c’est seulement au XVIIIe que des hommes se sont dressés pour l’abolir. Qui furent-ils ? Quelle fut l’histoire de ce mouvement ? Un complément indispensable au premier livre. Et peut-être, enfin, la possibilité d’un débat apaisé. Avec Olivier Grenouilleau et Abdourahman Waberi.

  • Lun. 11h45, Nouveau Monde

Humeurs noires

Auteurs de science-fiction ou auteurs de romans noirs, ils ne nous prédisent pas un avenir radieux, c’est le moins qu’on puisse dire. Ça s’annonce vraiment si mal ? Toutes les couleurs du noir au fil des journées avec Luis Sepulvada et Antonin Varenne le samedi au Nouveau monde à 14h, et à l’École Nationale Supérieure maritime samedi à 14h45 avec Cédric Fabre, Ingrid Astier, Andrée Michaud, Alex Berg.

Au bonheur de lire

Jadis libraire, aujourd’hui directeur du Centre Nationale du Livre, Vincent Monadé publie un petit lire, vif, enlevé, en forme d’appel aux armes : au rythme où les choses avancent il n’y aura bientôt plus que les femmes à lire des livres. Le seul espoir : qu’elles se mobilisent pour inciter compagnons et enfants à se risquer dans les chatoiements des mondes imaginaires ! Avec Vincent Monadé (Comment faire lire les hommes de votre vie, Payot) et l’ami Gilles Lapouge, lecteur gourmand s’il en est, qui fait de ses lectures des merveilles de textes (Maupassant, le sergent Bourgogne et Marguerite Duras, Albin Michel)

  • Samedi 17h45 au Nouveau Monde

Écrire pour inventer sa langue

On parle, à leur propos, de « souffle », de « voix » : le poème, le roman, sont toujours l’irruption de l’oralité dans la langue écrite, qui en bouscule les codes, lui donne vie. Sans eux la langue serait vite langue morte. Ce rapport complexe entre la parole (d’un sujet vivant) et la langue ( le système) est intensément vécu par tous les écrivains, particulièrement ceux qui se trouvent entre deux langues, particulièrement si l’une (par exemple le créole) est essentiellement orale. Comment dès lors tracer sa voie ? Une rencontre dimanche à l’Univers à 11 h30 avec Coutechève Lavoie Aupont, Ananda Devi, Guy Junior Regis et toujours dimanche à la salle Sainte-Anne à 14 h avec Aurélia Lassaque, Mackenzy Orcel, Seyhmus Dagtekin et Coutechève Lavoie Aupont.

Et tant d’autres…

C’est un bonheur, aussi, de pouvoir rencontrer son auteur favori seul, libre de déployer les facettes de son œuvre : ne manquez pas les rencontres à l’HÔTEL DU NOUVEAU MONDE avec Emmanuel Dongala (sam. 16h45), David Treuer (sam. 18h30), Tahar Ben Jelloun (dim. 16h), Yann Queffelec (dim. 14h), Louis Philippe Dalembert (lun. 15h45), Ahmed Saadawi (lun. 15h) ou à la MAISON DE L’IMAGINAIRE avec Pierre Bordage (sam. 16h30), Andreas Eschbach (dim. 16h15), Ian Mac Donald (lun.11h45), Nicolas Fructus (lun. 14h). Et une belle rencontre, à coup sûr avec Sylvain Tesson, à la ROTONDE SURCOUF le lundi matin à 11h45.