Simple jeu (incipit 1)

écrit par Louise DENOIX, en en 3ème au Collège Saut du Lièvre à Bischwiller (67)

Il me prit la main et m’entraîna parmi les loups…

Les masques me fixaient. Leurs regards cachés me troublaient. M’observaient-ils ? La main du garçon dans la mienne, j’avançais, emportée dans cette cohue incessante. Qui était ce jeune taureau ? Le mystère qu’il faisait régner était inquiétant. Je ne savais pas où ses pas me conduisaient, je me laissais guider. Les danseurs nous frôlaient, passant d’une danse à l’autre, frappant des pieds, tapant des mains. Une fête à la fois magnifique et lassante.

Je me souvenais vaguement de la voix enivrante d’un homme, mais le vide de mes pensées s’offrait à présent. Que c’était-il passé, comment étais-je arrivée ici ? Mes souvenirs étaient effacés, ma mémoire était perdue.

Je suivais cette main, ce taureau blanc, à travers des couloirs, des jardins, des salles pleines de gens ivres. Tout à coup, le garçon s’arrêta et me désigna une porte, mais je ne voulais pas lâcher sa main c’était mon seul réconfort. J’avais peur. Pourquoi cette porte ? Que cachait-elle ? Il partit et ma peur grandit.

J’ouvris la porte. Une voix me parvint du fond de la pièce vitrée : << Europe… Enfin vous voilà.>>

Je n’écoutais pas ses paroles. Je regardais au-dehors, une vaste plaine s’offrait à mon regard, je voulais m’y promener. Puis je remarquais un globe et comme on observe le feu mes yeux le fixèrent. Le temps semblait suspendu. C’est alors que l’homme se leva de son fauteuil et s’approcha de moi. Il susurra des mots à mon oreille sourde du raffut. Je reconnus la voix enivrante, c’était lui, mon dernier souvenir.

– Je sens votre peur, rassurez-vous, je ne vous veux aucun mal.

– Mais où suis-je ? Je ne me souviens de rien. Je ne sais même plus qui je suis.

– Seul votre instinct compte. Vous êtes le destin. Votre passé importe peu. Vous allez créer le futur par le présent.

Voyez-vous ce globe ? C’est votre plateau de jeu. Vous allez jouer avec quatre autres personnes qui vous attendent depuis une éternité. Ma chère approchez, je vais vous les présentez. Sachez, que cette partie vous changera à vie…

Je restais bouche bée, un jeu ! Je suivais cette voix enivrante comme j’avais suivie la main rassurante. Elle me fit traverser le couloir et entrer dans la pièce d’en face. Il y régnait une chaleur étouffante et un nuage de fumée recouvrait le plafond.

– Voici vos partenaires, chère amie. Je vous présente Mademoiselle Océane, Monsieur Amerigo, Madame Asia et Monsieur Afrika. Messieurs dames, je vous présente Mademoiselle Europe, elle jouera à vos côtés.

Je les regardais, ils semblaient tous incapables de prononcer un mot. Comme moi ils étaient terrorisés. Aucune réponse au petit bonjour que je leur adressais, pas même un sourire. Tout cela me laissait perplexe.

– Approchez chers participants je vais avoir l’honneur de vous présenter le jeu qui nous rassemble, j’ai nommé Humanitia !

Il claqua des doigts et le globe, qui m’avait fasciné, arriva flottant dans les airs. L’homme marchait dans la pièce, respirant calmement, ne nous adressant pas même un regard, seul son cigare semblait l’intéresser.

– Pendant cette fête, vous avez véritablement côtoyéZeus déguisé en taureau blanc, Ganesh en fantôme et Isis en léopard…

Maintenant c’est à vous de créer une nouvelle aire, une nouvelle mémoire, une nouvelle vie. Votre plateau de jeu se nomme Monde. Vous vous le partagerez. Vous possédez plusieurs cartes qui vous permettront de créer des personnes répondant à vos ordres. Vous pourrez vous unir ou vous opposer selon vos désirs, vos choix, vos humeurs. Réfléchissez bien avant d’agir et sachez que l’on apprend de ses erreurs mais également de celles des autres. Utiliser vos cartes à bon escient. Attention ! Humanitia n’est pas un simple jeu. Je vous souhaite bonne chance. Maintenant c’est à vous de jouer !

L’homme disparu dans un nuage de fumée. La porte claqua. La clé tourna dans la serrure. Nous étions maintenant tous les cinq, seuls, enfermés dans cette grande salle.

Je m’installais à la place qui m’était destinée, à nouveau fascinée par la sphère tournant sur elle-même.

Le globe devint blanc. Un texte apparu. Monsieur Amerigo pris la décision de le lire.

– Bonjour à vous cinq. Je suis le Monde. Ce n’est pas un hasard si vous êtes ici. Honorez votre destinée. Choisissez les bonnes personnes au bon moment. Ne gâchez aucun instant de la partie. C’est un jeu mais aussi une histoire qui s’écrit page par page. Ne gaspillez pas mes merveilles, vous pourriez me détruire. Vous êtes l’avenir, ne perdez jamais le contrôle, je m’en remets à vous. La partie va débuter, une nouvelle vie va commencer. Je vous souhaite bonne chance.

Ces derniers mots prononcés, le globe devint bleu, un territoire unique s’y trouvait. Monsieur Afrika retourna sa première carte, celle qui créa l’histoire, celle qui révolutionna le Monde… Lucy.