L’inde, pays des merveilles

Nouvelle écrite par Louise Rey, en 4ème au collège Le Marchedial, Rochefort- Montagne (63)

L’inde, pays des merveilles

Pourtant, ce matin-là, en se réveillant elle sentit tout de suite que quelque chose n’allait pas. Elle était chez sa grand-mère depuis plusieurs jours et elle s’y plaisait vraiment. Il existait entre sa grand-mère et elle une grande complicité si bien que chaque séjour qu’elle faisait dans cette vieille maison qui sentait le bois était pour elle un évènement. Sa grande timidité l’empêchait souvent de faire des choses mais, parfois, la vie vous pousse dans le dos et ne vous donne pas vraiment le choix, elle en fit l’expérience ce jour-là.... Elle sauta dans ses pantoufles et dévala les escaliers en sifflotant pour se mettre de bonne humeur. Sa grand-mère était déjà levée et préparait son petit déjeuner. Son beau visage avait pris un air triste.

« - Bonjour grand-mère !, dit-elle joyeusement.
- Bonjour Anna, je dois te dire une chose qui ne va pas te faire plaisir....
Anna attendait anxieusement la suite.
- Gabrielle s’est enfui... Lorsque je me suis levée ce matin, elle n’était plus dans sa caisse. J’ai été incapable de la retrouver, je ne sais pas où elle est passée...
Les larmes aux yeux, Anna réussit à murmurer :
- Je vais la chercher... »

Elle se mit donc à la recherche de sa chère tortue. C’était pour elle une compagne de toute épreuve, une présence réconfortante dans sa vie d’enfant, un cadeau dont elle ne pouvait plus se séparer, voilà pourquoi elle fut si triste de ne pas l’avoir trouvée après maintes recherches. Inconsolable, elle se réfugia dans la bibliothèque, un lieu où elle aimait aller lorsqu’elle avait du chagrin. C’est alors qu’en lançant un regard plein de larmes vers le dernier rayon de la bibliothèque, elle aperçut avec stupeur une feuille de salade, coincée dans les pages du livre qu’il fallait pousser pour apercevoir Shalingappa : le fameux récit de Marco Polo « Le livre des merveilles ». C’est alors qu’elle se dit qu’elle aussi pourrait faire une merveille : retrouver sa tortue adorée. Avec beaucoup de courage et en écartant un peu plus l’amas de livres de la bibliothèque, elle se faufila dans le passage qui menait en Inde.

Sitôt arrivée au marché, elle fut bousculée par la foule pressée. Ce qui attira son attention en premier dans cette animation était la vie. Tant de vie autour d’Anna, de gens qui discutaient, qui marchandaient, qui riaient parfois malgré les difficultés de cette vie de misère car c’est aussi la pauvreté qu’elle voyait à travers les enfants qui mendiaient, pour certains si jeunes et déjà livrés à eux mêmes. Enfin, elle se décida à avancer. Déjà, elle cherchait Gabrielle du regard. Ce n’est pas sa tortue qu’elle trouva mais bien des étals de fruits et légumes étranges : oranges au parfum subtil, pommes aux couleurs délicieuses, raisins alléchants, pastèques et papayes rafraichissantes, mangues exquises et bien d’autres saveurs encore. Elle aperçut aussi quelques animaux squelettiques et pour la plupart abandonnés. Alors qu’elle s’enfonçait encore un peu plus dans le marché, elle vit que, devant elle, se dressait un temple aux couleurs chatoyantes. Une femme voilée s’arrêta et, lui désignant une fresque au mur, lui dit : « Durga ». C’était le temple de Durga, déesse mère des indiens. Comme elle n’avait rien d’autre à faire pour le moment, elle entra dans le temple.

C’était un magnifique édifice où régnait la paix, le silence et le calme. L’atmosphère du lieu était toute dédiée au recueillement et à la prière. Il semblait que le poids des années pesait sur son imposant toit. Elle s’assit en tailleur et resta silencieuse. Elle ferma les yeux et fit une prière à la déesse pour que celle-ci l’aide à retrouver sa tortue. Lorsqu’elle eut finit, elle sortit du temple. Elle était calme et confiante. Elle fit quelques pas dans la rue où l’animation n’avait pas cessé. Soudain, elle fut bousculée par une bande d’enfants qui couraient à perdre haleine. Elle tomba brutalement sur le sol poussiéreux, deux enfants, un garçon et une fille s’étaient arrêtés pour l’aider à se relever.
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Difficilement, Anna fut remise sur pieds. Elle avait mal au dos. Le garçon lui parla mais elle ne comprit pas. Cette langue lui était inconnue. Elle arriva tout de même à comprendre qu’il s’appelait Adil et la fille Aishi, ils étaient frère et sœur. Après ces brèves présentations et sans lui donner le temps de plus réfléchir, ses deux nouveaux amis la prirent par le bras et l’entraînèrent avec eux dans le dédale des rues de la ville.

Durant toute la journée, Anna s’amusa beaucoup avec ses deux enfants intrépides. Ils étaient si différents mais c’était peut être ces différences qui les unissaient à présent. Ils lui avaient montré tous les secrets du marché, du moins tous ceux qu’ils connaissaient car il en existait une infinité. Ce monde émerveillait Anna au plus haut point, elle qui était si timide, semblait s’ouvrir au monde comme une fleur ouvre ses pétales. Elle riait et était heureuse. Cela faisait maintenant plusieurs heures qu’elle était en Inde et le soleil déclinait à l’horizon. Les marchands ramassaient leurs marchandises. Le marché se finissait, il ne restait plus beaucoup d’acheteurs dans les rues. Fatigués de leur course, Anna, Adil et Aishi s’assirent sur un muret. Il faisait plus frais à cette heure. Ils se rendirent alors compte qu’à coté d’eux, un vieillard attendait.

Celui ci ne bougeait pas bien qu’il ne restait plus personne autour de lui. Il souriait malicieusement, comme s’il savait des choses et attendait qu’Anna les découvrent. Dans son sourire, on lisait du savoir, le savoir des années qui imposait le respect devant ce vieillard. Devant lui, une minuscule boîte remuait un peu. Curieuse, Anna souleva délicatement le couvercle. Ce qu’elle découvrit à l’intérieur la fit sourire. Peut être pas autant que cela aurait dû mais Anna était vraiment heureuse de la revoir. Cette petite chose remuante lui avait tellement manqué ! Seulement voilà, il fallait qu’elle rentre et elle n’en avait aucune envie. Un peu comme quand elle devait revenir de chez une amie. Mais là, c’était encore pire... Elle ne s’était jamais autant amusée et elle n’avait jamais été elle-même à ce point. Elle découvrait quelqu’un de nouveau, une nouvelle facette de sa personnalité jusqu’alors bien cachée. Elle avait aussi fait des rencontres inoubliables comme celle d’Adil et d’Aishi : ces deux enfants lui avaient fait prendre conscience à quel point elle avait de la chance de vivre dans le luxe de la France. Lorsqu’elle serait rentrée, qu’allaient devenir ses amis ? Ils se débrouilleraient par eux mêmes, comme ils ont toujours fait. Et le vieillard mystérieux... D’où venait il ? Pourquoi était il là, juste pour elle ? Il était si vieux et il savait tant de choses ! Elle avait aussi découvert des mets étranges et délicieux. Encore une fois, elle avait beaucoup de chance.

Elle prit la tortue dans ses bras. Le vieillard souriait toujours. Il avait sûrement deviné ses pensées. Il lui désigna une petite porte, celle de la maison d’en face. C’était une toute petite maison. Anna fronça les sourcils mais, curieuse, elle s’avança dans l’ouverture. La dernière image qu’elle vit, fut le vieillard et ses amis souriant comme dans un rêve et lui faisant signe de la main comme pour lui dire adieu. Lorsqu’elle rouvrit les yeux, tout était fini... Elle était chez sa grand-mère, elle humait cette bonne odeur de bois et elle entendait une douce respiration au creux de ses bras : Gabrielle dormait d’un sommeil paisible. Elle venait de vivre une expérience inoubliable. Toute sa vie, elle se rappellerait l’Inde et ses merveilles.

A ses pieds, un livre était encore ouvert : « Le livre des merveilles ». Et, à la dernière page, on pouvait apercevoir une feuille de salade...