Biographie
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Arpenteur insatiable des mégalopoles occidentales, du XIIIe arrondissement parisien aux rues mal famées de Brooklyn, Karim Madani brouille les pistes et se joue des clichés des cultures urbaines. Journaliste freelance pour les magazines hip-hop Groove, Rap US ou encore Digital Hip-Hop, il se détache peu à peu de ce style à la fin des années 1990, à mesure que le genre sort de "l’underground". C’est à cette époque qu’il commence à écrire des fictions. Il publie son premier livre, Fragment de cauchemar américain, en 2005. Au fil des romans, il finit par s’éloigner du monde du hip-hop, gagne en maturité et en indépendance, tout en restant attaché au thème de la ville, de ses bas-fonds et de ses contre-cultures.
Karim Madani écrit ses romans comme l’on bâtirait des gratte-ciels. Il s’attache toujours à ériger la structure narrative de ses livres, du début à la fin. Dans un style très inspiré par le cinéma américain des années 1950, entre Howard Hawks et John Huston, il cherche à captiver le lecteur, « l’attraper par le col » pour ne plus le lâcher : « Il faut que ça cogne ». Il se réclame ainsi de la tradition romanesque américaine, où la narration tient une place forte, lorsqu’en France, elle reste d’après lui très sociologique. Néanmoins, Karim Madani n’a rien de l’écrivain de polar mainstream. Sa principale préoccupation est de dégager une atmosphère romanesque qui lui est propre. Il fait ainsi ressurgir ses influences musicales, en teintant ses phrases d’une atmosphère jazz, et faisant claquer ses mots comme un beat de hip-hop.
Dans son roman Le Jour du Fléau, Karim Madani délaisse complètement sa thématique hip-hop pour se tourner vers la ville et ses aspects les plus noirs. Elle est pour lui un véritable "laboratoire", et c’est avec une certaine jouissance qu’il se plait à bâtir sa propre cité, Arkestra, sorte de juxtaposition de tout ce que l’urbanisation a apporté de plus noir, entre Paris, New York et Gotham City. Karim Madani projette dans cette ville des personnages sombres, à la dérive entre dépressions et drogues. Si la violence tient une part majeure du roman, il se dégage aussi une mélancolie douce des personnages, lorsqu’ils parviennent à fuir, grâce aux rêves ou aux stupéfiants, cette ville qui les engloutit.
Avec Spike Lee : American Urban Story, il nous offre une ballade gonzo et « rap’n’roll » au cœur du New York populaire, hype et foisonnant des cinquante dernières années. Plus encore, à travers la vie et l’œuvre de Spike Lee (Malcolm X, Mo’Better Blues, La 25e Heure, etc.), c’est une certaine histoire de l’Amérique qui est ici contée, d’une Amérique noire pas tout à fait remise de l’épidémie de crack des 90’s, des drames nationaux provoqués par les attentats du 11 septembre 2001, des dévastations de l’ouragan Katrina en août 2005, sans oublier les bavures policières de 2014.
Bibliographie
- Spike Lee : American Urban Story (Don Quichotte, 2015)
- Le "Journal Infirme" de Clara Muller (Sarbacane, 2012)
- Le Jour du Fléau (Gallimard, Série Noire, 2011)
- Les Damnés du Bitume , (Belfond, 2008)
- Hip-Hop connexion (Editions sarbacane, 2007)
- Fragment de cauchemar américain (Inventaire/invention, 2005)