DOMINGUES Filipa

Afrique du Sud

The African Cypher (Fly on the Wall, 2004)

Biographie :

Co-fondatrice avec le réalisateur Bryan Little du collectif Fly on the Wall
au sein duquel elle assure la production, la Sud-Africaine Filipa Domingues est par ailleurs, sous le pseudonyme de Suicide Monkey, une photographe talentueuse dont le travail a été publié dans de nombreuses revues donc le National Geographic.

Elle a assuré la production du renversant documentaire The African Cypher, dont elle signe également les photos de tournage.


Pour en savoir plus :


Filmographie :

  • The African Cypher (Fly on the Wall, 2012)
  • Fokofpolisiekar (Fly on the Wall, 2009)
  • Tagging Toilets (Fly on the Wall, 2004)
The African Cypher

The African Cypher

Bryan LITTLE (Fly on the wall/2012/89’) -

AVANT PREMIERE - EXCLUSIVITE ETONNANTS VOYAGEURS

Véritable ovni urbain, ce documentaire nous plonge dans l’underground culturel des townships sud-africains. Là, dans les terrains vagues ou à même la chaussée, des jeunes, chômeurs ou anciens voyous, font de la danse de rue un exutoire. Dansant avec une énergie démente, « comme s’ils avaient une arme braquée sur la tempe », ils réinventent la culture du break-dance. Prix du Meilleur documentaire sud-africain au Festival du Film de Durban.

Coup de coeur de la programmation Etonnants Voyageurs 2013, la version française a été réalisée par le festival.

Interview avec le réalisateur Bryan Little

Pourriez-vous nous parler de la réalisation du film et de cette merveilleuse expérience ?

Nous avons mis un an à réaliser le film. Ce fût une expérience incroyable qui m’a beaucoup enrichi personnellement et en tant que cinéaste. L’objectif initial était de faire un court métrage introduisant les différents styles de danse sud africains dans le cadre de la compétition de danse "la red bull battle". Au fur et à mesure des rencontres avec ces danseurs, nous nous sommes rendus compte de tout ce qu’il y avait à raconter sur le sujet et nous sommes mis à filmer dans l’idée de réaliser un documentaire.
Nous avons traversé tout le pays, en restant des mois entiers à Soweto, Orange River, Mohlakeng et dans les Cape Flats. Nous avons vraiment essayé de nous intégrer dans la vie des danseurs et des communautés avec beaucoup de respect. Il fallait faire vraiment attention sur la façon dont approcher cet environnement. Etant cinéastes, nous avons le pouvoir de la caméra et c’est facile d’en abuser. Les gens veulent passer à la télévision, ils veulent être connus …. C’est très facile d’y aller et d’exploiter une culture pour en tirer des images superficielles. Nous voulions quelque chose de plus profond, nous voulions découvrir ce qui alimentait leur passion et leurs peurs.
Il a donc fallu prendre, rencontrer les gens, traîner au sein de leurs communautés, boire des bières avec eux, rencontrer leurs amis, leurs familles et les anciens.
J’attendais le moment adéquat pour intégrer la caméra : le moment où elle allait suivre notre coeur.
Pour moi, le cinéaste doit prendre en compte l’identité des gens qu’il filme, sinon rien de spécial ne va sortir, peu importe la beauté de la photographie.


A travers la grande majorité des fictions et des documentaires sur l’Afrique du sud, la jeunesse des townships est en général stigmatisée et l’angle le plus souvent traité est celui de la drogue et des gangs. The African Cypher met à mal ces clichés : était-ce votre but de départ ?

L’écrivaine nigériane Chimanda Ngozi Adichie, traite des dangers de n’avoir qu’une seule façon de voir l’Histoire : "N’avoir qu’une seule façon de voir l’Histoire crée des stéréotypes, et le problème avec les stéréotypes n’est pas qu’ils sont faux, mais qu’ils ont incomplet."
Mon intention de départ était de rester fidèle aux personnages et de montrer que les gens que je rencontrais étaient plus grands que les danses qu’ils exécutaient. Malgré leurs passés souvent horribles et effrayants, ces personnes vivent dans le présent, avec la passion et le courage comme élément essentiel à leur art.
Bien que le township soit le terrain idéal pour traiter du désespoir, des drogues, de la violence et de la pauvreté, pour flatter un public occidental avide de sensations fortes et de scandales, s’attarder sur ces fléaux ne sert qu’à faire du tort à tous ces jeunes dont les coeurs hurlent en dansant.


Je danse comme si j’avais un flingue sur la tempe.
Mada Sthembiso (Shakers&Movers)


La danse de rue en Afrique du Sud est un enfer complexe qui, comme la plupart des sous-cultures, n’existe que par les gens qui la pratiquent .
"A Mapetla, Soweto, si tu voles des téléphones portables ou des sacs a mains, tu ne vas pas vivre longtemps : la communauté te tueras" me dit Prince en marchant pour aller chez Mada autour d’un Shisa Nyama (barbecue extérieur informel, ou on peut acheter de la viande à manger et de la biere ndlr)
Prince est un pantsula. Il était Totsi, un gangster, un voyou. Aujourd’hui, il marche dans la rue avec fierté ; c’est un danseur Pantsula désormais célèbre à Soweto.

"Quand on danse, on trouve un but avec notre corps", dixit Tom London de Soweto’s Finest
Lorsque je vois Prince flâner dans la rue poussiéreuse, avec son mouvement fluide, sa casquette penchée sur le côté et une demarche un peu arrogante, il est pour moi l’incarnation de ce sentiment.
Quand il danse au coin de la rue avec Mada, les enfants, les Tsotsi’, les mamans, les chômeurs et les businessmen, s’arrêtent pour les regarder. Je me demande toujours ce que ça doit faire d’avoir tout ce pouvoir en soi. Pas d’équipement, pas de cerceau en feu - rien. Quoi qu’il en soit cette danse est magnifique, car c’est une expression de l’âme et une véritable lutte pour l’espoir et la vie. Peu importe le style ou le contexte, on danse pour donner ce que l’on a dans les tripes.

Bryan Little, Fly on the Wall

The African Cypher

Fly on the wall - 2012