SERHANE Abdelhak

Maroc

L’Homme qui marche sur les fesses (Seuil, 2013)

© Astrid di Crollalanza

Depuis Messaouda (Seuil, 1983), son premier roman, Abdelhak Serhane pointe du doigt les problèmes sociaux et politiques du Maroc. Opposant virulent au régime de Hassan II, puis de Mohammed VI, il dénonce dans ses écrits la corruption des dirigeants marocains et défend les libertés individuelles, n’hésitant pas pour cela à bousculer la tradition religieuse. Conteur de fables sociales violentes comme Le Soleil des obscurs (Seuil, 1992) et Les Temps noirs (Seuil, 2002), son dernier ouvrage, L’Homme qui marchait sur les fesses (Seuil, 2013), mêle récits personnels et indignations politiques.

Né en 1950 au Maroc, Abdelhak Serhane a quitté son pays natal en 2000 après avoir enseigné pendant des années à la faculté de Lettres et Sciences Sociales de Kénitra. Désormais exilé au Canada, ce diplômé en psychologie enseigne aujourd’hui la littérature française à l’université d’État de Louisiane.
Ses récits de jeunesse brisée, comme Les Enfants des rues étroites (Seuil, 1986), lui ont valu de recevoir le Prix français du Monde Arabe en 1993, puis le prix Francophonie, Afrique méditerranéenne en 1999. Figure politique et culturelle qui dérange et provoque, il est également l’auteur d’essais comme L’Amour circoncis (Eddif, 1996) où il aborde la sexualité chez les jeunes Marocains, face à une société conservatrice ; l’auteur tente ainsi de mettre en lumière, par sa plume incisive, les contradictions qui troublent le Maroc d’aujourd’hui.

Dans son dernier livre, L’Homme qui marche sur les fesses (Seuil, 2013), un écrivain, invité chez de vieux amis, est interpellé par un cul-de-jatte lors d’un banquet dionysiaque ; celui-ci l’accuse de faire de leurs vies misérables la matière de ses livres. Multipliant les échanges et les récits enchevêtrés, à la manière des Mille et une Nuits, Abdelhak Serhane met en scène une pléiade de personnages qui, le temps d’une nuit de beuveries et de palabres, débattent et livrent des tranches de vie, traduisant ainsi leur malaise existentiel.


Bibliographie :

  • L’Homme qui marche sur les fesses, roman (Seuil, 2013)
  • L’Homme qui descend des montagnes, roman (Seuil, 2009)
  • Les Temps Noirs, roman (Seuil, 2002)
  • Le Deuil des chiens, roman (Seuil, 1998)
  • Le Massacre de la tribu, essai (Eddif, 1997)
  • L’Amour circoncis, essai (Eddif, 1996)
  • Les Prolétaires de la haine, nouvelles (Publisud, 1995)
  • Chant d’ortie, poèmes (L’Harmattan, 1993)
  • La Nuit du secret, poèmes (Atelier des Grames, 1992)
  • Le Soleil des obscurs, roman (Seuil, 1992)
  • L’Ivre poème, poèmes (Al Kalum, 1989)
  • Les Enfants des rues étroites, roman (Seuil, 1986)
  • Messaouda, roman ( Seuil, 1983)
L'homme qui marche sur les fesses

L’homme qui marche sur les fesses

Seuil - 2013

Le narrateur, écrivain de son état, est accueilli dans une ville marocaine par de vieux amis, parmi lesquels se trouve le cul-de-jatte Rouida qui s’apprête à fêter son prochain mariage. Il accuse l’écrivain de faire de leurs vies misérables la matière de ses romans. Une longue soirée de beuveries et de palabres débute alors, où les récits scabreux et grivois se mêlent aux débats politiques et aux réminiscences violentes et dramatiques.
Sous les habits colorés d’un « banquet » arabe d’une sensualité irrévérencieuse, Abdelhak Serhane sonne ici la charge contre la tyrannie du système monarchique, tout en dénonçant l’état d’une société marocaine gangrénée par la corruption, le terrorisme et l’hypocrisie religieuse. Et ce, sans jamais se défaire d’un art consommé de l’autodérision qui donne toute sa force à sa prose savoureuse et truculente.


Revue de presse

  • " Fable violente et potache, d’une outrance parfois convenue, dégorgeant de gros mots et de tirades politiquement peu correctes pour une oreille royale, L’Homme qui marche sur les fesses tient du Banquet, de Platon, version maghrébine, et des Mille et une nuits, vues des bas-fonds. " Le Monde

L’Homme qui descend des montagnes

Seuil - 2009

Dans ce récit d’inspiration autobiographique, Abdelhak Serhane nous livre le portait émouvant d’une enfance marocaine dans les années 50 au sein d’une famille très pauvre installée dans un village isolée du Haut-Atlas. Enfance douloureuse marquée par une extrême misère matérielle et affective, et dominée par la figure d’un père violent et d’une mère soumise. C’est pourtant dans ce contexte que le jeune narrateur va faire son apprentissage de la vie, s’initier au français en lisant les bribes de journaux dont son père a tapissé le plafond de sa masure, et prendre peu à peu conscience de la condition peu enviable de ses compatriotes subissant l’arbitraire d’un pouvoir archaïque. Car à travers la profusion d’anecdotes souvent touchantes qui ponctue l’histoire de cette famille, c’est en filigrane un tableau au vitriol d’une société gangrénée par la corruption et les interdits religieux qui est ici brossé, à mille lieux de l’image parfois complaisante que l’on peut avoir en Occident de la monarchie alaouite. Un livre engagé servi par une plume alerte et une verve expressive.