CENDREY Jean-Yves

Honecker 21 (Actes Sud, 2009)

Biographie

© B.Charoy

Écrivain du genre cogneur, à la plume énergique croisant le trivial comme le lyrique, Jean-Yves Cendrey décrit l’absurdité comique de la vie matérielle dans une époque "de trop vaines complications".
Petit, délinquant révolté, « écorché vif », Jean-Yves Cendrey s’inscrit en fac de Lettres à Poitiers puis en Histoire de l’art à Bordeaux, mais il préfère consacrer l’essentiel de son temps à vagabonder, en particulier dans le Sud de l’Europe. À l’âge de 28 ans, il découvre le premier livre d’une lycéenne timide et surdouée, Marie Ndiaye Quant au riche avenir. Il lui écrit, elle lui répond, ils correspondent, se rencontrent, s’aiment et se marient. « Elle était une reine dans son château. J’étais un chemineau, un indigent de l’écriture. » Selon lui, elle l’apaise, canalise sa révolte dans l’écriture. Il écrit son premier livre à 31 ans, elle donne naissance à un premier enfant, puis un deuxième, un troisième. Loin du buzz médiatique, le couple mène une existence tranquille et nomade, ils s’installent à la Rochelle, puis à Paris, à Barcelone, à Rome et Berlin.
De retour en France en 1994, la famille vit en Normandie, à Cormeilles, un bourg du bocage augeron destiné à devenir tristement célèbre pour une affaire de pédophilie qui amènera l’auteur à écrire Les Jouets vivants, (Éditions de l’Olivier, 2005). Suivent d’autres migrations, Marie-Galante et la Gironde.
À la suite de l’élection de Nicolas Sarkozy à la présidence, il quitte la France et s’installe à Berlin avec son épouse et leurs trois enfants.
Il a écrit pour le théâtre, la radio, le cinéma, et a publié, depuis 1988, une quinzaine d’ouvrages, pour l’essentiel parus aux éditions P.O.L puis aux éditions de l’Olivier. Son dernier roman, Honecker 21, prend ancrage à Berlin justement : de l’humour noir pour suivre la cavalcade d’un homme "ordinaire".


Bibliographie :

Romans

  • Honecker 21 (Actes Sud, 2010)
  • Le Japon comme ma poche, Éditions de l’Arbre vengeur, 2009
  • Honecker 21, Actes Sud, 2009
  • La maison ne fait plus crédit, Éditions de l’Olivier, 2008
  • Les Jouets vivants, Éditions de l’Olivier, 2005
  • Une simple créature, Éditions de l’Olivier, 2001.
  • Les Petites Sœurs de sang, Éditions de l’Olivier, 1999.
  • Les morts vont vite, P.O.L., Paris, 1991.
  • Atlas menteur, P.O.L., Paris, 1989.
  • Principes du cochon, P.O.L., Paris, 1988

    Théâtre

  • Pauvre maison de nos rêves suivi de L’Herbe tendre, Actes Sud, coll. « Papiers », Arles, France, 2010.
  • Pauvre maison de nos rêves, Lansman Éditeur, Carnières , Belgique, 2009.
  • Providence et Toute vérité, Jean-Yves Cendrey et Marie NDiaye, Puzzle, Comp’Act, 2001 ; Gallimard, 2007.

Présentation de Honecker 21

spip_logo Honecker 21, ou les vingt chapitres de la vie d’un Berlinois
moyen. Homme ordinaire, il souffre de maux qu’il juge
extraordinaires parce qu’il les croit uniquement les siens. Ce
sont en fait les maux communs de notre florissante société,
entre bureaucratie folle et libéralisme ricaneur, tyrannie
patronale et laxisme sentimental, course au confort, égarements
financiers, et bien sûr passages répétés par ces guichets
de l’humiliation que sont les comptoirs des services
après-vente… Charlot malheureux, jaloux, malveillant à l’occasion,
Matthias Honecker fait sourire, et même rire, parce
qu’il n’est que ce qu’il est : notre semblable, notre frère, qui
nous donne de nos nouvelles ici et maintenant.
Berlin, première décennie du troisième millénaire de notre ère,
quelques jours avant le passage à une quelconque année suivante. Matthias Honecker est las, et d’ailleurs rien ne va : les voitures font
des caprices, les machines à café dysfonctionnent aussi, les couronnes
dentaires désertent la mâchoire sans prévenir. Pourtant Honecker, cadre supérieur dans une florissante entreprise
de téléphonie mobile fait plus que correctement bouillir la
marmite du couple branché qu’il forme avec Turid, une intellectuelle
interdisciplinaire et arty qui lui a, l’année précédente, fait la
bonne surprise de lui annoncer comme un cadeau qu’il allait être
père. A présent l’enfant est là et Turid n’est plus que l’ombre d’elle même.
Crise conjugale, premières affres de la maturité, sursaut vital ?
Honecker aspire à un changement, à de « l’intensité », et ce désir,
nouveau pour lui, le prend au dépourvu d’autant que les symptômes
de la mutation qui semble vouloir s’opérer en lui sont plus
qu’étranges : lui-même s’étonne en effet de convoiter désormais
des femmes sourdes et muettes aux chairs flasques mais qui réveillent
sa libido comme jamais, de vouloir quitter sur un coup de tête
le quartier berlinois tout ce qu’il y a de « tendance » où il vit pour
faire emménager sa petite famille dans un appartement sis dans le
navire de béton conçu par un célèbre architecte du siècle précédent
afin de jouir des bienfaits de la vue-imprenable-sur-Berlin
comme de roboratives promenades dominicales sur les deux « 
montagnes » artificielles locales dont l’une est entièrement constituée
des décombres issus de la destruction de Berlin après la
guerre …
« Si je range l’impossible salut au magasin des accessoires, que
reste-t-il ? Tout un homme, fait de tous les hommes et qui les vaut
tous et que vaut n’importe qui » écrivait Sartre à la fin de son autobiographie,
Les Mots, dans une phrase conclusive et à juste titre restée
célèbre. Matthias Honecker est cet homme, aujourd’hui, qui
nous donne de nos nouvelles depuis l’un des centres géométriques
de la vieille Europe : il porte le numéro 21, son matricule, comme
« Le Prisonnier » de l’antique série américaine. Son patronyme,
Honecker, recèle le très déplorable fantôme d’une Histoire qui,
pour avoir été cauchemardesque, semble a posteriori avoir au
moins le mérite d’avoir existé, tant le héros de Jean-Yves Cendrey
peine, quant à lui, à identifier dans les temps désorientés qui sont
les siens ne serait-ce que le commencement d’un nouvel épisode
susceptible de conférer un peu de sens au devenir de l’humanité…

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    Revue de presse

  • « L’auteur compose une fable burlesque très réussie, pointant les travers du monde contemporain (…) Sous la surface comique, le roman recèle une gravité, un aspect inquiétant frisant parfois l’irrationnel. Des fantasmes de meurtres affleurent Honecker, dont l ‘entreprise de téléphone, coeur nucléaire du libéralisme, semble être un symptôme de notre époque. En donnant à son personnage le nom de l’ex-dirigeant de la RDA, l’auteur relève de la permanence de l’aliénation, malgré la chute du Mur. Le chiffre 21, dont il affuble Honecker, est celui du Prisonnier, dans la série éponyme, la geôle aurait-elle simplement changé d’apparence ? »
    Magazine Transfuge, novembre 2009
  • « Cette déglingue qui humanise la vie d’Honecker est un écho à celle qui dématéralise nos vies dans le monde du libéralisme post-moderne. Cendrey poursuit son travail littéraire de destruction de l’homme faible. »
    Rolling Stone, novembre 2009
  • "Il faut un sacré style, celui de Cendrey, pour porter l’excès de ces
    aventures loufoques et manier cette folie pas si douce. Derrière
    le plaisant d’une satire enlevée se distille l’angoisse existentielle...
    Comment conduire sa vie quand tout, tout le temps, vous détourne
    de l’essentiel ? Prisonnier des temps modernes,« Honecker
    2I » s’agite, s’agite, jusqu’à ce qu’au 2Ie chapitre..."
    Le point, novembre 2009
  • "Nous sommes tous des Charlots qui s’ignorent, Cendrey nous le révèle sans aucune méchanceté"
    Magazine littéraire, septembre 2009
  • "Très à l’aise dans le maniement de l’humour noir, Jean-Yve Cendrey propulse son Honecker dans la tourmente, pour la plus grande joie du lecteur. Ce qui ne l’empêche pas de brocarder joyeusement l’époque contemporaine et ses bobos aux moeurs étranges."
    Lire, septembre 2009
  • "Ne jamais accepter la souffrance. Dans Honecker 21, le romancier la dénonce, en se souvenant des douleurs qui ont marqué son enfance (...) Le livre est drôlement désespéré, acide, ravageur"
    Le monde des lives, octobre 2009
  • "Jean Yves Cendrey dresse le portrait de l’"Homo fragilus", cette créature si moderne. (...) L’épopée économique d’Honecker le mènera à la découverte du cynisme, cette qualité première de la réussite sociale."
    Mariane, aôut 2009
  • "En plus de ce festival d’humour noir efficacement réglé, l’auteur offre une belle évocation du Berlin d’aujourd’hui"
    Livres Hebdo, mai 2009
  • " Honecker 21 est un roman sautillant, virevoltant, au rythme où l’on dévale les escaliers avec un petit rire étouffé chaque fois qu’on rebondit sur une marche."
    Le soir, octobre 2009

    "Cendrey parvient à faire de ses aventures quotidiennes une épopée tragique, un ballet burlesque et aérien dont l’apogée sera polonaise, c’est dire. Rarement une satire de l’homme contemporain et du système dans lequel il se débat n’aura fait montre de tant de jubilation dans le démolissage en règle. Rien ne résiste à la plume dévastatrice de Cendrey. Honecker, c’est toi, c’est moi, et mieux vaut en rire car c’est loin d’être gagné."
    Le magazine des livres, janvier 2010

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Honecker 21

Actes Sud - 2009

Berlin, de nos jours, veille d’une année nouvelle. Matthias Honecker, cadre dans une prédatrice entreprise de téléphonie mobile, est las d’un monde où le trahissent sa voiture, sa machine à café ou ses couronnes dentaires. Sans même parler d’un climat délétère avec sa femme, une intellectuelle parfaitement présentable et “tendance”, qui vient de lui faire inopinément cadeau de leur premier enfant avant de sombrer dans la dépression. Crise conjugale, premières affres d’une maturité re doutée, sursaut de révolte désespéré ? Ce trentenaire à la dérive, que seul son patronyme relie à une grande Histoire dorénavant aux abonnés absents, doit d’un même élan déménager et faire honneur au réveillon faussement festif qu’un patron capricieux impose à ses employés, bien loin de Berlin, aux confins improbables de la Poméranie… Furieux de s’y soumettre, en état d’insurrection maritale et existentielle, Honecker se précipite dès lors dans une épopée déglinguée, vers le rendez-vous inattendu que le hasard lui assigne, en apothéose d’une existence jetée en pâture aux Temps modernes… Portrait grinçant, jubilatoire, libérateur de notre semblable, le roman de Jean-Yves Cendrey est servi par une langue d’une efficacité et d’une rigueur mordantes. Tel le mythique Charlot de Chaplin, Matthias Honecker nous donne à sa manière des nouvelles de notre société telle qu’elle se débat, aujourd’hui, par-delà les murs qu’elle a éradiqués et pourtant reconstruits, dans l’espace immatériel, postmoderne et tragicomique de son libéralisme en déshérence.

La folie des hommes

Saint-Malo 2010
Avec Gary VICTOR, Jean-Yves CENDREY, Libar FOFANA, DOA. Un débat animé par Jean-Claude Lebrun.

Les romans noirs de notre époque

Saint-Malo 2010
Avec Pascal DESSAINT, Jean-Yves CENDREY, Sébastien LAPAQUE, Alain CLARET. Un débat animé par Jean-Claude Lebrun.