Souvenirs de Théodore Monod : "Nombre de découvertes sont en réalité dues au hasard…"

10 juin 2006.
 

Les nombreux voyages qui m’ont permis de visiter tant des régions de l’Afrique saharienne n’ont pas pour objectif d’éprouver des émotions poétiques voire littéraires, ni même le souci de découvrir au contact des nomades la prodigieuse façon dont ils ont réussi à vivre au bord du monde habitable une vie collective, riche de connaissances écologiques concernant le monde végétal et animal et, plus généralement, les données indispensables à connaître et à pratiquer en pays désertique, ne fût-ce que la science de l’orientation.
L’objectif de mes voyages est tout autre, il consiste à rassasier ma curiosité dans différents domaines de la connaissance et, en particulier, dans celui des sciences de la nature, géologie, botanique, zoologie, préhistoire et archéologie, etc.
Chaque voyage a donc un objectif, défini à l’avance mais il faut reconnaître qu’en fait nombre de découvertes dont certaines ont été importantes sont dues en réalité au hasard.
C’est à ce dernier que je dois, par exemple, la découverte des principaux éléments de la géologie de l’accident circulaire des Richat (filons des carbonatites, necks de même nature, gabbros, analcimolites, nombreux microfossiles, énorme gisement des galets aménagés de l’oued Akardil, etc.), des argiles fossilifères siluriennes de l’Adrar Oriental, d’une florule des phanérogames au Gilf Kébir (Désert Libyque).
Le hasard jouera donc un rôle primordial dans les découvertes d’un voyageur scientifique et c’est heureux car ce dernier pourra espérer chaque matin en prenant le départ de tomber au cours de la longue journée de marche qui l’attend, sur quelques faits nouveaux ou quelques spécimens importants venant lui prouver que le hasard lui a été, une fois de plus, favorable.
Ayant eu le privilège de participer à plusieurs reprises au Festival Etonnants Voyageurs de Saint-Malo, je tiens à insister sur le grand intérêt que présente cette célèbre rencontre pour un voyageur un peu particulier puisqu’il s’efforce d’ajouter au voyage proprement dit la découverte d’objets et de faits nouveaux, capables d’accroître le domaine de la connaissance scientifique.
Que la ville de Saint-Malo soit assurée de ma gratitude pour son souci de reconnaître de son mieux les formes les plus variés du voyage.

Théodore Monod