SFAR Joann

France

7 mars 2013.
 

Biographie

© Denis Felix

Bédéaste prolifique, Joann Sfar a, en quinze ans de carrière, "constamment été sous le feu des projecteurs, bâtissant une œuvre généreuse, tentaculaire, protéiforme…" (dixit son biographe). Plusieurs dizaines de séries et une belle centaine de titres, chez les majors comme les indépendants : de la saga médiévale humoristique Donjon écrite à quatre mains avec son comparse Lewis Trondheim, à la fable des Chat du Rabbin qui s’est vendue à plusieurs millions d’exemplaires, et dont l’adaptation au cinéma l’a fait rentrer par la grande porte dans le monde de l’animation. Et si Joann Sfar se fait tour à tour commissaire d’exposition ("Brassens ou la liberté" à la Cité de la musique à Paris), ou réalisateur - du biopic à succès sur Gainsbourg, le voici qui s’attaque à un autre genre, le roman, avec L’Éternel, dans lequel il revisite le thème du vampire…

Joann Sfar est né en 1971 à Nice, où il passe une maîtrise de philosophie et suit des cours de peinture avant d’entrer à l’école des Beaux-Arts de Paris. Dès l’âge de 15 ans il envoie aux éditeurs ses projets de BD. Il lui faudra attendre huit ans pour voir Dargaud, Delcourt et l’Association répondre favorablement à ses envois… la même année. Depuis, rien ne l’arrête. En 1997, il publie La fille du Professeur avec Emmanuel Guibert, bientôt couronné du prix René Goscinny et de l’ Alph’Art Coup de Cœur à Angoulême. Puis la production explose au fil des années, il multiplie les collaborations, les séries, les thèmes. En roue libre, il lance série sur série, sans savoir s’il les finira un jour car, comme il le dit lui-même il déteste que les choses s’arrêtent, aussi ses personnages reprennent-il quelque fois vie d’une série à l’autre...

Boulimique créateur, passionné de dessin, il s’entoure de nombreux complices, aux visages hétéroclites : David B, Emmanuel Guibert, Lewis Trondheim, Christophe Blain, José Luis Munuera, Hervé Tanquerelle, Pénélope Bagieu ou Clément Oubrerie… fine fleur de la BD made in France. Virtuose multiforme de la biographie (Gainsbourg, Chagall, Pascin…), il a su créer un univers foisonnant marqué notamment par une inspiration débridée et un graphisme en permanente évolution. S’il écrit aussi bien pour les enfants (Petit Vampire, à partir de 1999) que pour les adolescents (cycle Donjon) (les jeunes lecteurs sont pour lui les plus importants !), il rencontre également le succès auprès d’un public adulte séduit par sa faculté à concilier le réel et le fantastique poétique, la drôlerie et le concept philosophique (dans Le Chat du rabbin [à partir de 2002], un chat espiègle et malicieux étudie le Talmud pour séduire la fille de son maître), mais aussi par sa narration graphique visant moins à surprendre le lecteur qu’à le divertir (Professeur Bell, à partir de 1999 ; Pascin, à partir de 2000 ; Grand Vampire, à partir de 2001 ; les Olives noires, dessins d’Emmanuel Guibert, à partir de 2001 ; le Minuscule Mousquetaire, à partir de 2001 ; Socrate le demi-chien, dessins de Christophe Blain, à partir de 2002 ; les Carnets, à partir de 2002 ; Klezmer, à partir de 2005). Il se fait tour à tour directeur de collection jeunesse (Breal), et dirige depuis 2005 la collection Bayou aux éditions Gallimard Jeunesse, chez qui il fait paraître une adaptation en bande dessinée du Petit Prince de Saint-Exupéry (2008)

Sa première rencontre avec le cinéma a lieu en 2010, lorsqu’il réalise Gainsbourg, vie héroïque , un biopic suivi un an plus tard par l’adaptation des tomes 1, 2 et 5 de sa série de bandes-dessinées intitulée Le Chat du Rabbin. Et comme rien ne l’arrête, depuis 2012, il tient une chronique sur France Inter et publie son « Journal De Merde » dans Télérama, à raison de deux pages par jour…
Pour parler de son actualité récente, paraît en 2012, Jeangot, une BD en jeunesse chez Gallimard, scénario à la sauce Sfar sous les traits de crayon de Clément Oubrerie, premier acte d’une biographie de Django Reinhardt devenu renard pour l’occasion. Manouche à souhait !
Avec Tokyo, il nous livre aussi un objet étrange, mélangeant dessins et photographies, dans lequel il balance en vrac tout ce qui lui passe par la tête, par le coeur… Certains y retrouvent plus que tout son côté chien-fou de ses débuts. Une traversée du cerveau de Sfar… qui devrait avoir un tome 2 d’ici peu.

Enfin, L’Éternel, son premier vrai roman, est une histoire de vampire qui mêle humour et émotion, le tout agrémenté du talent et de l’originalité de ses bandes dessinées : Joann Sfar revisite une figure incontournable du fantastique, pour le plus grand plaisir des lecteurs du genre. On parle d’une adaptation prochaine par Canal Plus sous la forme d’une série, réalisée par Sfar en personne, bien entendu…

Voir aussi le blog de Joann Sfar !


Bibliographie :

Bandes-dessinées

Romans


Présentation de L’Éternel

Pour son malheur, Ionas, violoniste juif ukrainien, doux-rêveur mort au combat en 1917, ressuscite sous la forme d’un vampire. Il n’a qu’une obsession : retrouver sa fiancée Hiéléna, fille d’un luthier d’Odessa. Mais pour "vivre", il doit boire du sang, ce qui le plonge dans des affres de culpabilité. Il passe outre tout ce que sa douceur naturelle lui interdit et, rongé par sa mauvaise conscience, fini par découvrir que son frère Caïn et sa belle ont convolé en justes noces et attendent un enfant...

Près d’un siècle et quelques pogroms plus tard, Ionas, qui a élu domicile à New York, essaie de trouver auprès de la très sexy Rebecka Streisand, psychanalyste toute juste veuve d’une célèbre rock star, un recours pour vaincre sa culpabilité et vivre en harmonie avec ses démons.

Humour, dérision, sens du romanesque, truculence, sensualité, émotion...on retrouve dans ce Nosferatu revu et corrigé par Woody Allen et Albert Cohen réunis, tout ce qui fait l’originalité et la profondeur des bandes dessinées de Sfar, qui marie ici mieux que jamais esprit ludique et intelligence.