AWUMEY Edem

Québec

27 avril 2012.
 

Biographie :

© Jean-Marc Carisse

Grand Prix littéraire de l’Afrique noire en 2006, le roman Port-Mélo impose d’emblée Edem Awumey, né en 1975, comme l’une des voix prometteuse de la scène littéraire africaine. Auteur d’une thèse sur les littératures de l’exil, le jeune écrivain d’origine togolaise, aujourd’hui citoyen canadien, explore avec talent les affres de l’errance et du déracinement dans Les Pieds sales, dont la portée universelle, saluée par Tahar Ben Jelloun, lui vaut d’être sélectionné sur la première liste du Goncourt 2009. Douloureux et inspiré, le roman Rose déluge (2012) évoque à nouveau les maux qui rongent l’Afrique contemporaine et poussent ses fils sur les chemins de l’exil.


Bibliographie :


Argumentaire de Rose déluge (Seuil, 2012) :

« Rose Lafayette, corps fluet, arqué au fil de saisons de blues et d’épreuves, petite tête à moitié chauve, une brindille à la place du cou, des jambes de gamine anorexique et des pieds si petits aux traces à peine visibles sur la terre. »Un jour, la vieille Africaine se meurt ; Sambo son neveu accepte le fardeau léger qu’elle lui a confié, une boîte en bois contenant ses cheveux et ses ongles, qu’il devra inhumer sur les rives du Mississipi.« Ce qu’elle nomme le pays des siens, qu’elle n’a jamais connu, bercail lointain qu’elle m’a souvent décrit dans un tableau aux motifs flous, floue et poreuse elle-même à force de n’exister que dans ses mirages. »Et voici Sambo au bord de la route, attendant un autobus qui lui fera traverser les Etats-Unis d’Amérique. Il est abordé par Louise, ardente et généreuse, elle-même en proie à l’ouragan de sa vie antérieure. Les caresses échangées feront surgir tous les fantômes des tragédies passées, entre douleur et tendresse. Dans un magnifique don d’amour, la jeune femme accompagnera le garçon jusqu’au bout de son voyage à la Nouvelle-Orléans. Aux portes du déluge.

Résumé de Port-Mélo :

" La caisse aux gorilles traversa le cauchemar du Port, les rues fantômes, un vieillard et une petite fille se tenaient par la main, la petite fille en larmes sur les traces de la mère violée et découpée plus loin sur un trottoir. Le cauchemar du Port, une séance d’exécution publique en présence d’une foule silencieuse, la troupe qui charge son tir et le condamné qui commence son dernier gospel : Amazing Grace... A la place des vitrines éclatées de la rue Z, des rideaux blancs sur lesquels un passant, un type aussi fou que l’ami Manuel, écrivait : " Quand tu me tiens, Port-Mélo... Je perds le nord et la peau. "J’ai à peine le temps de classer ces images, ranger dans un coin de la mémoire les pneus brûlés, les deux pendus qui gesticulent devant le musée et le croque-mort débordé. Parce qu’il avait du boulot, il avait des corps... " Sur une côte d’Afrique, une milice cruelle réprime la moindre manif, étouffe dans les gorges la moindre clameur. Manuel, traqué, marche " à contre-voie ", il tient un précieux carnet des disparus que les autorités voudraient détruire. La mère Cori, sage vieille folle, raconte et attend. La jeune et si belle Joséphine s’offre en un clin d’étoile entre un flamboyant et un wharf rouillé... Une mosaïque de personnages et tout un peuple jouent leur vie dans une ville et un pays qui effacent l’homme et ses traces, qui met du blanc sur le viol des corps et des rêves. Ici, par la grâce d’une écriture lancinante et émouvante, l’Afrique nous tend le miroir d’un monde à notre image, qui se démembre sous ses masques riant et criant d’inhumaine humanité.