KWAHULE Koffi

Côte d’Ivoire

8 mars 2015.
 

Lorsqu’on l’interroge sur son travail d’écrivain, Koffi Kwahulé répond : « Je suis un jazzman ». Une réponse surprenante ; une réponse, à l’image de sa démarche narrative : rythmée, rythmique, ouverte à toutes les improvisations, guettant la musique au détour du verbe.

En vingt ans, Koffi Kwahulé, à la fois romancier, essayiste, comédien et metteur en scène, s’est imposé comme une figure incontournable des lettres africaines modernes. Né en Côte d’Ivoire en 1956, mais vivant à Paris, Koffi Kwahulé est connu dans le monde entier pour son œuvre théâtrale, riche d’une vingtaine de pièces. Formé à l’Institut National des Arts d’Abidjan, il entre en 1979 à l’École Nationale Supérieure des Arts et Techniques du Théâtre de Paris, et poursuit parallèlement des études théâtrales à la Sorbonne Nouvelle où il obtient un doctorat d’Études théâtrales. Ses pièces, dont les plus connues ont pour titre Bintou, Cette vieille magie noire, Fama, Big Shoot, Jaz ou Misterioso – 119, ont été traduites en de nombreuses langues et jouées en Europe, en Afrique, et aux Etats-Unis. À travers les thèmes de la violence et de la quête d’identité, l’écriture sensuelle et saccadée de Koffi Kwahulé explose les frontières du langage et absorbe les dynamiques abruptes de l’oralité.

Son premier roman, Babyface, paru en 2006 chez Gallimard et lauréat du Prix Ahmadou-Kourouma, raconte l’amour en temps de guerre, sur fond de jazz et d’improvisation. En 2010, dans Monsieur Ki, Koffi Kwahulé poursuit cette narration musicale, rompant la linéarité du récit par des jeux de miroir, portant un peu plus haut son chant qui mêle la fièvre de la folie à celle du jazz, les mystères de la sorcellerie à ceux de la tragédie. L’auteur reçoit en 2013 le Prix Édouard-Glissant, destiné à honorer une œuvre artistique marquante de notre temps.

Avec son nouveau roman, Nouvel an chinois, il dépeint la dérive d’une poignée d’habitants du quartier Saint-Ambroise à Paris où les personnages de cette nouvelle dramaturgie urbaine imprégnée de jazz sont portés par un grand balancement entre désir et répulsion. « Nouvel an chinois est un roman choral où l’extrémisme et la misère affective ont le même visage bouffon » (article Le Blues de Nosferatu, Anaïs Heluin).


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DERNIER OUVRAGE

 
Romans

Nouvel an chinois

Zulma Editions - 2015

On ne sait jamais trop, d’une année l’autre, quand défile le carnaval chinois dans le quartier de Saint-Ambroise, entre la place Léon-Blum et le boulevard Richard-Lenoir. C’est en tout cas l’hiver, un jour de janvier ou février. Et c’est là que tout advient.
C’est ce jour-là, au milieu des couleurs criardes, au son des gongs et des cymbales, que revient le funeste Guillaume-Alexandre Demontfaucon, alias Nosferatu, individu irréconciliable qui prêche même la nuit du haut de son balcon sa haine des Chinois, porté par le souffle de Nabucco à plein volume.
Un jour comme tous les autres pour Ézéchiel qui, depuis la mort de son père, écoute Back to Black en boucle entre les murs de sa chambre. Ézéchiel qui occupe les longues journées qu’il ne passe plus au lycée à « prier », comme il dit, sur fond de fantasmes flamboyants et débridés. Sa mère, femme ardente désormais absente à tous comme à elle-même, fait une fois de plus semblant d’aller travailler. Sora’shilé, la grande sœur qui maintient le lien comme elle peut, continue pour Ézéchiel le récit de sa vie perchée « dans une cabane dans les arbres ». Tandis que l’imprévisible Melsa Coën, « jolie liane noire souriante », s’empare peu à peu des rêveries d’Ézechiel.
Jusqu’au jour où Ézéchiel sort enfin de chez lui…
Dans ce roman qu’on croirait écrit dans l’énergie syncopée de l’improvisation, tout commence par le rythme, dans le grand balancement du désir et de la répulsion qui porte les personnages de cette nouvelle dramaturgie urbaine.