GRAND DEBAT

Écrire la guerre

28 mai 2014.

SAM. 17H30, SALLE MAUPERTUIS (PALAIS DU GRAND LARGE)

 
J. Rouaud, H. Mingarelli, D. Daeninckx, W. Tochman

Comment dire la guerre ? Comment, au plus simple, dire la vérité de l’expérience
vécue, donner à voir, à entendre, donner la parole aux sans voix,
quand de toutes parts se déchaînent les discours de propagande ? Certains,
refusant la fiction, ne voudront croire qu’aux témoignages. Mais la guerre
conduit bien au-delà : au sentiment de vivre une expérience psychologique,
métaphysique, fondamentale, révélant « au coeur des ténèbres » une dimension
jusque-là inconnue, ou refoulée, de l’âme humaine. Avec ce soupçon,
alors, que cette puissance de destruction à l’oeuvre sur les champs de
bataille est celle aussi de l’enfantement d’un nouveau monde – que renforce
la révolution de 1917… Écrire la guerre : après elle, on n’écrira plus de la
même manière, on ne filmera plus, on ne pensera plus son rapport aux
autres et à soi-même de la même manière. Et ce sont Le voyage au bout
de la nuit
de Céline, Les réprouvrés d’Ernst von Salomon, Les falaises de
marbre
de Junger, L’homme sans qualités de Musil : n’est-ce pas la fiction,
au final, qui aura le mieux dit la guerre ? Écrire la guerre : une question qui
interpelle les écrivains, alors, et continue de le faire au long du siècle. Et
aujourd’hui plus que jamais. Parce qu’elle renvoie à l’essence même de la
littérature.

Avec Pierre Schoentjes, Jean Rouaud, Hubert Mingarelli,
Didier Daeninckx, Patrick de Saint-Exépury
et Wojciech Tochman.

 

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Essais

L’avenir des simples

Grasset - 2020

On a bien compris que l’objectif des « multi-monstres » (multinationales, Gafa, oligarchie financière) était de nous décérébrer, de squatter par tous les moyens notre esprit pour empêcher l’exercice d’une pensée libre, nous obligeant à regarder le doigt qui pointe la lune, ce qui est le geste de tout dictateur montrant la voie à suivre, de nous rendre dépendant des produits manufacturés, des services et des applications en tout genre, nous dépossédant ainsi de notre savoir-faire qui est leur grand ennemi, un savoir-faire à qui nous devons d’avoir traversé des millénaires, du jardinage à la cuisine en passant par le bricolage, l’art savant de l’aiguille et du tricot et la pratique d’un instrument de musique au lieu qu’on se sature les oreilles de décibels. Reprendre son temps, un temps à soi, reprendre la possession pleine de sa vie. Et pour échapper à l’emprise des « multi-monstres », utiliser toutes les armes d’une guérilla économique, montrer un mépris souverain pour leurs colifichets : « votre appareil ne nous intéresse pas », graffite le capitaine Haddock sur un mur. Contre les transports, la proximité des services, contre l’agriculture intensive empoisonneuse, des multitudes de parcelles d’agro- écologie, ce qui sera aussi un moyen de lutter contre l’immense solitude des campagnes et l’encombrement des villes, contre la dépendance, la réappropriation des gestes vitaux, contre les heures abrutissantes au travail, une nouvelle répartition du temps, contre les yeux vissés au portable, le nez au vent, et l’arme fatale contre un système hégémonique vivant de la consommation de viande, le véganisme. Car nous ne sommes pas 7 milliards, mais 80 milliards, à moins de considérer que tout ce bétail qui sert à engraisser nos artères ne respire pas, ne mange pas, ne boit pas, ne défèque pas. Il y a plus de porcs que d’habitants en Bretagne, et quatre-vingt pour cent des terres cultivées dans le monde le sont à usage des élevages, pour lesquels on ne regarde pas à la santé des sols et des plantes. Renoncer à la consommation de viande et des produits laitiers, c’est refroidir l’atmosphère, soulager la terre et les mers de leurs rejets toxiques, se porter mieux, envoyer pointer au chômage les actionnaires de Bayer-Monsanto et en finir avec le calvaire des animaux de boucherie pour qui, écrivait Isaac Bashevis Singer, « c’est un éternel Treblinka ».

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Revue de presse :

 

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Récit

L’École des colonies

Hoëbeke - 2015

« Nos ancêtres les Gaulois. » C’est ainsi que débutent les cours d’histoire des écoles du Tonkin, du Dahomey ou du Soudan, à l’orée du XXe siècle. Le domaine colonial français - 11 millions de kilomètres carrés, 48 millions d’habitants - occupe alors le deuxième rang mondial.
Les écoliers d’Afrique subsaharienne, d’Asie, d’Océanie, des Antilles ou du Maghreb sont éduqués pour devenir de vrais Français. Chaque matin, les cours commencent après avoir inscrit en français sur un tableau noir « Mes enfants, aimez la France, votre nouvelle patrie ».
L’apprentissage de la langue est l’élément clé de la francisation. Hygiène, discipline et morale, les valeurs civilisatrices, sont inculquées sur un mode paternaliste tricoté de racisme.
Le traitement manichéen réservé à l’expansion coloniale dans les manuels scolaires reflète l’idéologie d’alors : le colonialisme envisagé comme une nécessité politique, économique et humanitaire, une oeuvre républicaine apte à établir ordre et paix. Un enseignement pour modeler aux besoins de la France une future main-d’oeuvre qu’il importe d’assimiler. En écho, les cartes de géographie détaillent les richesses économiques des "possessions" françaises et des affiches scolaires édifiantes sanctifient Savorgnan de Brazza ou Lyautey comme "pacificateurs".

 

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Essais

Nos regard se sont rencontrés

Le Mot et le Reste - 2022

La scène de la rencontre avec un animal

Un essai littéraire qui remet au centre des préoccupations les relations entre animaux humains et non humains.

Si on excepte les animaux de compagnie, les bêtes sont absentes de la vie quotidienne dans les sociétés occidentales urbaines et prospères. Or, c’est aussi par le contact direct avec les animaux que nous nous définissons comme humains, par la compréhension de ce qui nous lie à eux et ce qui nous différencie. Cet essai interroge ce lien intime à partir d’une scène présente dans nombre de textes littéraires : la rencontre entre animaux humains et non humains. Basé sur une vaste enquête qui explore le champ littéraire du dernier siècle, ce livre s’efforce de dégager la manière dont l’écriture fait écho à l’empathie qui s’exprime envers les animaux et notamment à l’importance des rencontres comme déclencheurs d’un engagement fort en faveur d droits des animaux et de l’écologie au sens large.

 

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Récit

Aujourd’hui, nous allons dessiner la mort. Retour au Rwanda

Le 7 avril 1994, il y a vingt ans, débutait le génocide rwandais. Ilnous appartient encore de ruiner le dessein des meurtriers, leur volonté d’effacement d’un peuple, en portant le témoignage des rescapés et en préservant avec eux la mémoire des disparus. Brillant héritier de Ryszard Kapuscinski, le reporter polonais Wojciech Tochman immerge ses lecteurs dans l’histoire spécifique de chacune des personnes qu’il présente, révélant le caractère irréductible, unique, de chaque vie. Léonard, orphelin tout dévoué à sa fratrie, guide l’auteur à travers le « pays des mille collines et du million de sourires », ignorant d’abord qu’il est l’un des principaux sujets de cette enquête. De village en village, la parole des habitants révèle l’envers d’un paysage paradisiaque dont chaque recoin fut le théâtre d’atrocités.
Ce livre est un document humain, il n’a nulle thèse à présenter. Tochman interroge les conséquences du génocide, non seulement pour les survivants et les bourreaux, pour les enfants des uns et les enfants des autres, mais aussi pour nous, qui ne pouvons qu’être ébranlés, malgré la distance et la sécurité dans laquelle nous vivons.

Traduit par Margot Carlier

 

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Romans

L’homme qui avait soif

Stock - 2014

Japon, 1946, pendant l’occupation américaine.
Démobilisé depuis peu, Hisao revient de la montagne avec une soif obsédante et des rêves qui le hantent. À bord du train qui doit le conduire vers la femme aimée, il commet une terrible erreur. Descendu pour boire, il voit le train repartir avec sa valise et l’oeuf de jade qu’il a prévu d’offrir à Shigeko.
Alors qu’un suspens subtil mais intense invite le lecteur à suivre les péripéties d’Hisao courant après sa valise, se dessine la bataille de Peleliu où il a combattu aux côtés de Takeshi, jeune soldat troublant qui chante dans le noir. Et qui mourra à ses côtés.
Dans ce roman aussi puissant que poétique, Hubert Mingarelli évoque avec une rare élégance l’amitié entre hommes et le Japon meurtri par la guerre.
Hisao retrouvera-t-il sa valise et arrivera-t-il jusqu’au « mystère Shigeko » ?

 

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Roman graphique

La fantaisie des Dieux

Les Arènes - 2014

Il n’y avait plus de mots. Juste ce silence. Épais, lourd. C’était un génocide, celui des Tutsis du Rwanda, le troisième du xxe siècle. Il faisait beau, il faisait chaud. Sur les collines de Bisesero, nous avions pénétré le monde du grand secret. Des instituteurs tuaient leurs élèves, des policiers menaient la battue. C’était la « grande moisson ». François Mitterrand niait « le crime des crimes ». Comment raconter ?
Patrick de Saint-Exupéry est le co-fondateur et le rédacteur en chef de la revue XXI. Prix Albert Londres, il a été témoin du génocide tutsi. Il est l’auteur de L’Inavouable, La France au Rwanda (Les Arènes) devenu un classique depuis sa parution en 2004.
Hippolyte est l’auteur d’une dizaine d’albums de reportage en BD ou de séries, notamment L’Afrique de papa (Des bulles dans l’océan), Les ombres (Phébus) et Le Maître de Ballantrae, adaptées de Robert-Louis Stevenson (Denoël Graphic). Il avait 17 ans lors du génocide tutsi. Il s’est rendu pour la première fois au Rwanda en 2013.


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