Avec Yahia Belaskri, Yvon Le Men, Dominique Batraville et Louis-Philippe Dalembert.
Depuis qu’il a composé le nine one one, le gérant pakistanais de la supérette de Franklin Heights, un quartier au nord de Milwaukee, ne dort plus : ses cauchemars sont habités de visages noirs hurlant « Je ne peux plus respirer ». Jamais il n’aurait dû appeler le numéro d’urgence pour un billet de banque suspect. Mais il est trop tard, et les médias du monde entier ne cessent de lui rappeler la mort effroyable de son client de passage, étouffé par le genou d’un policier.
Le meurtre de George Floyd en mai 2020 a inspiré à Louis-Philippe Dalembert l’écriture de cet ample et bouleversant roman. Mais c’est la vie de son héros, une figure imaginaire prénommée Emmett – comme Emmett Till, un adolescent assassiné par des racistes du Sud en 1955 –, qu’il va mettre en scène, la vie d’un gamin des ghettos noirs que son talent pour le football américain promettait à un riche avenir.
La force de ce livre, c’est de brosser de façon poignante et tendre le portrait d’un homme ordinaire que sa mort terrifiante a sorti du lot. Avec la verve et l’humour qui lui sont coutumiers, l’écrivain nous le rend aimable et familier, tout en affirmant, par la voix de Ma Robinson, l’ex-gardienne de prison devenue pasteure, sa foi dans une humanité meilleure.
Tout commence à Port-au-Prince, par le tonnerre et l’engloutissement, le grand tremblement de gorge de « Monsieur Richter » avalant d’un coup des centaines de milliers de femmes, d’hommes, d’enfants et d’animaux. Face à ce nouvel esprit vaudou de la mort, M’Badjo Baldini – « nègre errant d’origine italienne » surnommé l’Ange de charbon – parvient à tenir la dragée haute à l’apocalypse, danse macabre où défilent Baron Samedi et Grande Brigitte, tous les saints du calendrier et tous les zombies des cimetières. Mais l’Ange de charbon est aussi une espèce singulière de traité sur le désir, un cantique des cantiques adressé à toutes les amantes sans discrimination, vierges verrouillées, reines, filles de joie, à commencer par Salomé dite Sassa, « si belle qu’elle valait trois Parisiennes ». Cette autobiographie d’un rescapé en tenue de prêtre vaudou, la tête dans les étoiles et le regard insolent, est secouée d’un bout à l’autre d’un grand éclat de rire, ultime réplique du séisme ravageur, ajoutant une dimension à ce chant d’un Maldoror noir qui se demande, après avoir crié « halte-là ! vagabond séisme ! », s’il ne devrait pas mettre sa peau à l’envers.
« Tous les poèmes rassemblés ici ne m’émeuvent pas au même moment. Un jour, c’est l’un ; un jour, c’est l’autre. Cela dépend du temps qu’il fait dehors, dedans. Cela dépend de l’air du temps, du temps de poème qu’il fait entre moi et le poème que je reçois. Le lecteur, aussi, fait le poème. Et je suis, chaque jour, un lecteur différent. »
Ce livre est la trace des nombreuses soirées « Il fait un temps de poème », animées depuis 30 ans par Yvon Le Men, et accueillies au Carré Magique de Lannion.
Cette anthologie rassemble des contributions d’auteurs invités entre 2013 et 2023 tels que Katerina Apostolopoulou, Luc Baba, Terez Bardaine, Stéphane Bataillon, Jeanne Benameur, Seyhmus Dagtekin, Salah Al Hamdani, Cypris Kophidès, Aurélia Lassaque, Patrick Laupin, Ružica Miličević, Hala Mohammad, Maya Ombasic, Nathalie Papin, Paola Pigani, Thierry Renard, Dominique Sampiero, Faruk Sehic, Ariane Lefauconnier et Joël Vernet entre autres.
Avec Les Grandes Espérances – titre provocateur en ces temps de guerres, d’attentisme climatique, d’ultralibéralisme et de colonialisme numérique –, Apulée #8 ouvre portes et fenêtres aux souffles de toutes les résistances, aux voix toujours renouvelées de la révolte, venues d’Iran, d’Ukraine, du Maghreb, ..., où des femmes et des hommes avides de justice et de liberté luttent au péril de leur vie contre les pires archaïsmes. C’est dans l’adversité redoutable que les mots d’espérance et de liberté s’incarnent au plus vif : quiconque s’oppose sans faillir, dans les manifestations, les prisons, les camps, au-devant des pires oppressions, peut en témoigner.
Existe-t-il une « fonction utopique » qui se situerait à l’avant de la conscience et des savoirs, quelque part dans l’inaccompli du désir et du rêve – le fameux Principe Espérance (Ernst Bloch) –, ou plus précisément un devenir en acte, porté par l’imaginaire des individus et des peuples en butte aux détresses de l’Histoire ? La poésie, l’art et les débats de ce nouvel opus d’Apulée configurent une insurrection à feu couvert afin que l’espérance garde plus que jamais l’âpre saveur de la vie.