Gardien du sens des mots

Avec Orlando Luis Pardo Lazo, Dany Laferrière, Lyonel Trouillot, Pascal Bruckner

27 mai 2016.
 


Avec Orlando Luis Pardo Lazo, Dany Laferrière, Lyonel Trouillot, Pascal Bruckner
Animé par Eduardo CASTILLO

Vaclav Havel le rappelait sans cesse : la responsabilité première des écrivains, face aux totalitarismes, est d’être les gardiens du sens des mots. Cette manière insidieuse qu’avait le pouvoir en place de renverser le sens des mots en son inverse, d’appeler liberté l’oppression, « programme d’entente et de concorde entre les peuples » l’épuration ethnique, etc. C’est aussi de lutter contre l’acceptation de mots tabous, qu’on laisse s’installer ici même, qui sont autant d’intimations à ne plus penser – à se taire…

 

DERNIER OUVRAGE

 
Témoignage

Autobiographie américaine

Bouquins - 2024

L’œuvre autobiographique de Dany Laferrière, rassemblée dans ce volume, montre qu’il personnifie une démarche singulière, qu’a déterminé son attitude envers la vie. Et c’est cette attitude qui fait que tant de lecteurs aiment mettre leurs pas dans les siens.
"Un matin de février 1984, il y a quarante ans de cela, je me suis réveillé dans le grand froid montréalais, avec cette idée étrange qu’on ne devrait pas écrire plus d’un livre. Le manuscrit que j’avais fatigué toute la nuit dernière s’était assoupi près de la fenêtre de ma modeste chambre, au milieu des restes du repas de la veille. De mon lit, je l’observais avec un mélange de suspicion et de tendresse. J’attendais trop peut-être de ce premier roman écrit pourtant dans la misère et la liberté. D’abord qu’il me sorte de l’usine, ensuite qu’il me rende célèbre.
Venant d’un pays qui a connu l’esclavage et la dictature, et ayant longuement vécu dans des villes comme Montréal, Miami ou New York, avant de parcourir São Paulo, Mexico, San Juan ou Buenos Aires, je me sentais comme un arbre qui marche dans sa forêt. J’ai fouillé dans l’histoire pour découvrir que cette Amérique continentale était le rêve de Bolívar dont la devise se résumait à « Un continent, un pays ». Tant de cultures diverses que les écrivains de ce continent ou de ce pays allaient m’apprendre. J’ai donc décidé d’entreprendre une longue balade littéraire, en commençant par cette Caraïbe où j’ai pris naissance, et où je suis tombé, un jour de pluie, sur le recueil du poète haïtien René Philoctète Ces îles qui marchent. Je note dans mon calepin noir ce vers rimbaldien : « Je suis venu vers toi, nu, et sans bagages ». C’est donc les mains libres et la tête légère que j’ai entrepris cet interminable voyage dans cette Amérique bigarrée et survoltée."
D. L.

 

DERNIER OUVRAGE

 
Poésie

Malséance

Atlantiques déchaînés - 2023

Prenant élan sur un poème écrit à vingt ans et lu par Hervé Denis le 1er août 1980 dans un spectacle par la suite interdit par la dictature de Jean-Claude Duvalier, Malséance oppose la violence verbale à la violence de l’histoire et du réel : pauvreté, racisme, héritages coloniaux, migration forcée, postures, impostures... mille formes de domination et de travestissements dans ce que le poète René Philoctète appelait « le procès des hommes contre l’homme ».
Complicité, évidente ou discrète avec de nombreux poètes dans la fonte d’un je/nous : voix singulière et sujet collectif, la poésie devant être faite par tous. Passé, présent, colère, révolte, adhésion et rejet, voyages et transbordements, repères et pertes de repères, implacablement hostile à l’ordre, aux ordres, critique de la permanence et des actualités des malheurs du monde, Malséance est un soupçon de ce que la poésie ou peut-être l’intention poétique se doit d’être envers tous les pouvoirs : l’abolition des frontières et la plus résolue des impolitesses.

Couverture provisoire

 

DERNIER OUVRAGE

 
Nouvelles

Cuba, année zéro

Hoëbeke - 2016

Cuba, année Zéro est un mouvement littéraire de jeunes écrivains émergents, qui vivent et écrivent à Cuba. Un mouvement essentiellement urbain puisque presque tous vivent à La Havane, et les sujets de leurs textes parlent aussi de la ville. Une autre similitude les rassemble, celle de n’accepter aucune étiquette.
Leur nom de groupe n’est pas lié à leur âge, mais à la date où ils commencent à publier, essentiellement sur des blogs ou dans des revues alternatives : l’année 2000.

Cette anthologie réunit 11 écrivains qui partagent un même univers littéraire raréfié par les interdits et les compromis et s’insurgent contre toute instrumentalisation et dénoncent la fiction du nationalisme, qui pèse comme une chape de plomb sur la création.
À travers onze nouvelles qui parlent aussi bien de prostitution, de drogue, de combats ou encore de zombies. Orlando Luis Pardo Lazo a réussi à mettre sur pied une sélection étonnante pleine d’histoires tout à fait uniques, au style très vif fait d’argot cubain, jeux de mots, un langage proche du slam, qui, ensemble, créent une image forte d’un Cuba loin de la salsa, des cigares et du rhum... Le Cuba d’aujourd’hui tel que le vivent les vrais Cubains.

Traduit de l’espagnol par François Gaudry.

 

DERNIER OUVRAGE

 
Essais

La Sagesse de l’argent : essai

Grasset - 2016

« L’argent est une promesse qui cherche une sagesse. L’expression doit s’entendre au double sens : il est sage d’avoir de l’argent, il est sage de s’interroger sur lui. Il rend tout homme philosophe malgré lui : bien penser, c’est aussi apprendre à bien dépenser, pour soi et pour autrui. Avec l’argent, nul n’est à l’aise : ceux qui croient le détester l’idolâtrent en secret. Ceux qui l’idolâtrent le surestiment. Ceux qui feignent de le mépriser se mentent à eux-mêmes. Engouement problématique, réprobation impossible. Telle est la difficulté. Mais si la sagesse ne consiste pas à s’attaquer à cela même qui paraît à tous le symbole de la folie, à quoi bon la philosophie ? »