Né en 1986 à Hasselt, une ville néerlandophone de Belgique, Brecht Evens revendique son statut de dessinateur BD car il veut « raconter des histoires qui ne tiendraient pas en une seule image » et parce qu’il souhaite que « chacun puisse rentrer chez soi avec un album et s’y perdre ».
Le jeune prodige n’a que 22 ans lorsqu’il publie Les Noceurs, né de son projet de fin d’études à l’Institut supérieur des Beaux-Arts Saint-Luc de Gand. Ce premier album publié en France inaugure une fidèle collaboration avec Thomas Gabison d’Actes Sud BD. Couronné par le Prix Willy Vanderstreen, puis le Prix de l’audace du festival d’Angoulême en 2011, Les Noceurs, à l’instar des albums qui suivront-Les Amateurs, Panthère-, bouscule et libère les codes du neuvième art.
En se souvenant de grands maîtres et d’illustrateurs nourriciers, tels Bruegel l’Ancien, Chagall, Kandinsky ou Ever Meulen, Brecht Evens invente un langage pictural où se mêlent et se superposent aquarelle, gouache, encre de chine, crayon de couleurs.
Son dessin, comme indomptable, sort des cases, efface les bulles, investit des pleines pages qui regorgent de détails, de trompe-l’œil et autres fausses perspectives.
En constante métamorphose, son univers lui ressemble : épuré et fourmillant, élégant et psychédélique, transparent et sombre, figuratif et abstrait, follement libre et inquiet. On fouille le dessin comme le fond de son âme. Chacune des planches requiert une attention sans faille pour déceler, chaque fois, de nouvelles formes, de nouveaux indices, faisant du lecteur le découvreur d’un monde qui bientôt n’appartient qu’à lui. L’artiste travaille lentement. Longtemps il regarde ce que la peinture elle-même, dans ses « accidents », lui souffle, avant de poursuivre son dessin dont il ne connait jamais par avance l’issue...
Indéfinissable, beau et dérangeant : Panthère (2014) dans la lignée de ses précédents ouvrages, est une œuvre de haut-vol. Un roman graphique, qui raconte l’intrusion d’un mystérieux félin princier dans la vie d’une petite fille, dont le chat vient de mourir. Un livre subtil qui épouse les codes du conte pour enfants et les poussent à leur paroxysme grinçant. Hommage indirect à Calvin et Hobbes, Alice au pays des merveilles, Max et les maximonstres, Panthère reste aussi inclassable que son auteur.
Il réalise par ailleurs un carnet de voyage relié pour Vuitton, véritable hommage à Paris, sa ville d’adoption. Dans ce bel ouvrage, l’artiste belge y dépeint sa vision de la capitale. Loin d’être exhaustif, le carnet de voyage de 168 pages se concentre sur quelques quartiers et restitue les ambiances, tantôt festives, tantôt calmes, qui font le charme de la capitale. Les habitants comme l’architecture y sont à l’honneur.
Ses fables, aussi séduisantes que troublantes, sont exposées tant dans les galeries d’art (Galerie Martel, Paris) que dans les plus grands festivals (Festival International de la bande dessinée d’Angoulême 2013, Rencontre du 9e art 2016).
Son dernier ouvrage Les Rigoles est un récit choral haut en couleur, sur les vies croisées d’Iona, Rodolphe et Victoria, la nuit à Paris...
Il exposera les planches de cet ouvrage durant la prochaine édition du festival à l’occasion de l’exposition « Quand la peinture inspire le 9e art ».
Photo : ©Athos Burez
Présentation de Travel Book : Paris by Brecht Evens par l’artiste lui-même :
https://www.youtube.com/watch?v=GFsBaAXZU_U
Bibliographie
- Les Rigoles (Actes sud, 2018)
- Travel Book : Paris by Brecht Evens (Louis Vuitton, 2016)
- Panthère (Actes Sud BD, 2014)
- Les cromosaures de l’espace, avec Wladimir Anselme (composition et chant) (Actes Sud Junior, 2014)
- Les Amateurs (Actes Sud BD, 2011)
- Les Noceurs (Actes Sud BD, 2010) (traduit en 7 langues)