Une rencontre bouleversante

Ecrit par BIAIS Paul (5ème, Collège Gabriel Guist’hau de Nantes)

23 avril 2019.
 

Une rencontre bouleversante

À quelle tribu appartenait celle-ci ? Jason arracha ses semelles à la terre gluante et se dirigea vers elle.

Mais après quelques pas, le soulier du jeune garçon resta figé sur le sol. Il s’écroula dans la boue verdâtre, qui s’étalait sur quelques centaines de mètres. Il leva la tête, honteux.
La jeune fille le fixait toujours des yeux, d’une profondeur telle que Jason put y deviner un passé hostile et des épreuves insurmontables. Elle était remarquablement belle. Un détail attira l’attention du garçon : ses yeux en amande étaient d’une transparence bleutée, comme l’eau vive d’un ruisseau. D’une transparence telle que le garçon parvenait à y voir son propre reflet. Son teint métissé ajoutait à son élégance. Ses traits prononcés trahissaient son caractère et sa personnalité. Malgré ses cheveux désordonnés et ses joues rougies par la fraîcheur matinale, elle était éblouissante. Elle ne laissait paraître aucune expression et son visage demeurait crispé, ou plutôt fermé.
Il parvint à se relever péniblement et tenta un « bonjour » en guise d’approche. Il crut déceler un peu de perplexité sur son visage. Elle ne le comprenait pas, il s’y attendait. Elle tenta pourtant d’établir la communication à son tour puis, après quelques instants d’incertitude, l’extase se dessina sur ses traits. Un fou rire irrépressible métamorphosa radicalement sa physionomie. Jason la regardait, abasourdi. Le garçon crut avoir affaire à de la folie. Il prit la fuite, sans réfléchir, mais il était complètement désorienté. Ses leçons de géographie n’étaient donc seulement pure imagination ? Était-ce juste pour que les enfants développent leur originalité et leur créativité ? Jason était totalement égaré, ce labyrinthe de l’enfer ne finissait plus, les cris, la misère, la saleté dégoûtaient le garçon. Il prit ses jambes à son coup, mais un hurlement lui perça les oreilles. Le visage de Jason se figea, il était éberlué. Comment un tel son pouvait provenir des cordes vocales d’un être humain ? Il s’élança alors sans la moindre hésitation telle une gazelle poursuivie par un prédateur. Il se savait traqué par la jeune fille durant son périple dans les couloirs sinueux ou régnait la famine et la terreur. Tout se mélangeait dans sa tête, plus rien n’avait aucune signification… Sa course l’exténuait, il ne sentait plus aucun de ses membres. Sa tête le faisait atrocement souffrir. Une lourde plaque métallique vint alors abréger toutes souffrances en s’écrasant sur le garçon. Il sentit seulement son dos se briser en un craquement audible et une douleur fulgurante se fit ressentir au plus profond de ses entrailles. Puis, plus rien…

*
Les paupières du patient s’ouvrirent de nouveau sur le monde, si familier, si rassurant… Ses parents étaient penchés au-dessus de son corps couvert de balafres plus impressionnantes les unes que les autres. Jason réalisa que sa mère pleurait à chaudes larmes. Il n’appréciait guère être le témoin d’un tel désespoir, mais ne pouvait s’empêcher de souligner sa beauté. Ses boucles brunes lui tombaient en désordre sur le visage, ses yeux de couleur miel, rougis par l’émotion, demeuraient magnifiques et ses cils humidifiés brillaient de mille éclats. Des gouttes de transpiration perlaient sur son front. Elle murmurait des paroles de haine sous l’expression sidérée de Jason. C’était très inhabituel. En effet, il avait plutôt l’habitude qu’elle le réprimande sur son langage familier. Or, elle utilisait des termes et des injures, dont il ne la croyait pas capable.
Malgré quelques nombreux trous noirs, Jason se remémorait avoir été poursuivi, dans un lieu hostile, fait de cabanes improvisées et misérables. Soudain, un médecin à la mine grave fit irruption dans la pièce. Il dirigea alors ses grands yeux verts vers les parents du blessé. Ils éclatèrent en sanglots.
Un regard en dit plus que mille mots.
*