Qu’est-ce qu’un être humain ?
Avec Patrick Chamoiseau, Raphaël Glucksmann, Edgar Morin, Shumona Sinha
16 juin 2017.
Avec Patrick Chamoiseau, Raphaël Glucksmann, Edgar Morin, Shumona Sinha
Animé par Xavier de Bontride
De berceau de civilisation, la Méditerranée est devenue un cimetière marin – mais qu’est-ce qui meurt, de nous, avec ces malheureux ? Ailleurs, nous multiplions les camps. Mais qu’est-ce que nous nous enfermons de nous-mêmes, ce faisant ? Rester « entre soi » ? Mais que reste-t-il alors de ce « soi » ? Qu’est-ce que cela veut encore dire pour nous, d’être humain ? Qu’est-ce qu’un être humain ? Il y a un imaginaire de l’être ensemble à refonder. Avec Patrick Chamoiseau, Edgar Morin, dont toute la pensée tend vers la définition des contours d’un nouvel humanisme, Raphaël Glucksmann, qui après un séjour à Calais a publié un texte fort, dans Médiapart sur la faillite de l’idéal républicain : De quoi Calais est-il le nom ?, Shumona Sinha a été interprète auprès de l’Ofpra, chargé de gérer les demandes d’asiles politiques, dans Assommons les pauvres !, elle dressait un constat sans complaisance et publie Apatrides (Éditions de L’Olivier), Raphaël Krafft avec Passeur (Buchet-Chastel) qui, en racontant l’ascension du col de Fenestre pour aider des réfugiés à atteindre la France, met en exergue l’absurdité des lignes imaginaires dans un document profondément humain. Retour ligne manuel
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Romans
La Matière de l’absence
Seuil - 2016
"Quand nous nous retrouvâmes autour des restes de Man Ninotte - ses deux filles, trois garçons - et qu’il nous fallut confronter l’immobilité plénière, l’impassibilité absente et minérale, le silence sans commencement ni fin, comme lors de cette même ronde autour du cercueil que l’on devait sceller, nousdûmes être persuadés qu’une bonne partie du monde s’était comme amoindri, que les horizons s’étaient soudain déformés, laissant des irruptions de vides et des dévastations de nature invisible. Une bonne part de nous avait basculé hors de l’espace et hors du temps."
À partir de la mort de sa mère, l’écrivain visite l’histoire encore méconnue des Antilles, leurs genèses, leurs rituels, leurs modes de vie, remontant aux origines de l’humanité, retraçant l’étonnante créativité d’un peuple qui a inauguré ses mythes et ses combats dans le ventre du bateau négrier. Dialoguant avec sa sœur, dite "la Baronne", il évoque, avec tendresse, humour et profondeur, la poétique de tout un monde qui dépasse le cercle familial et qui nous initie à un bel art de vivre.
Revue de presse
- "Un premier résumé du livre pourrait être celui-ci : un frère et une sœur se racontent, le temps d’une visite au cimetière, ce qu’ils ont fait de la perte, ce que leur mémoire a produit autour du manque. « Négrillon [c’est ainsi que l’aînée appelle le benjamin], ceux qui vivent longtemps n’ont pas besoin de cette réponse », prévient La Baronne, qui ramène son intellectuel de frère à l’évidence du mystère." (Catherine Portevin, Philo mag)
- "Dans ce livre, Chamoiseau sollicite ce qui le travaille depuis ses premiers écrits : sa vocation d’écrivain, son rapport à la langue française et au créole, le peuple martiniquais, ce « magma anthropologique » créé par le choc des rencontres entre Amérindiens, Européens et Africains, rejoints plus tard par les travailleurs chinois, indiens et syro-libanais." (Gladys Marivat, Le Monde)
- "Avec une précision chirurgicale, le prix Goncourt 1992 dit l’histoire de sa famille mais également celle de sa terre et d’une société née de la transplantation, de l’esclavage et d’un réenracinement progressif. Ce livre constitue un véritable bréviaire pour qui connaît peu les étapes de la construction socioculturelle de la Martinique." (France Info)
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Essais
Les souvenirs viennent à ma rencontre
Fayard - 2019
Dans ce livre, Edgar Morin, né en 1921, a choisi de réunir tous les souvenirs qui sont remontés à sa mémoire. A 97 ans, celle-ci est intacte et lui permet de dérouler devant nous l’épopée vivante d’un homme qui a traversé les grands événements du XXe siècle. La grande histoire se mêle en permanence à l’histoire d’une vie riche de voyages, de rencontres où l’amitié et l’amour occupent une place centrale.
Ces souvenirs ne sont pas venus selon un ordre chronologique comme le sont habituellement les Mémoires. Ils sont venus à ma rencontre selon l’inspiration, les circonstances. S’interpellant les uns les autres, certains en ont fait émerger d’autres de l’oubli.
Ils témoignent que j’ai pu admirer inconditionnellement des hommes ou femmes qui furent à la fois mes héros et mes amis.
Ils témoignent des dérives et des dégradations, mais aussi des grandeurs et des noblesses que les violents remous de l’Histoire ont entraînées chez tant de proches.
Ils témoignent des illuminations qui m’ont révélé mes vérités ; de mes émotions, de mes ferveurs, de mes douleurs, de mes bonheurs.
Ils témoignent que je suis devenu tout ce que j’ai rencontré.
Ils témoignent que le fils unique, orphelin de mère que j’étais, a trouvé dans sa vie des frères et des sœurs.
Ils témoignent de mes résistances : sous l’Occupation, puis au cours des guerres d’Algérie, de Yougoslavie, du Moyen-Orient, et contre la montée de deux barbaries, l’une venue du fond des âges, de la haine, du mépris, du fanatisme, l’autre froide, voire glacée, du calcul et du profit, toutes deux désormais sans freins.
Ces souvenirs témoignent enfin d’une extrême diversité de curiosités et d’intérêts, mais aussi d’une obsession essentielle, celle qu’exprimait Kant et qui n’a cessé de m’animer : Que puis-je savoir ? Que puis-je croire ? Que puis-je espérer ? Inséparable de la triple question : qu’est-ce que l’homme, la vie, l’univers ?
Cette interrogation, je me suis donné le droit de la poursuivre toute ma vie.
Edgar Morin
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Revue de presse :
- « Ce grand penseur souligne l’importance de la pensée dans notre société malade » (Elodie Suigo, 30/01/2020, France Info)
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Romans
Apatride
L’Olivier - 2017
« D’autres nuits surgirent derrière ses paupières, mais la lumière n’y avait plus de chaleur, il ne s’en échappait aucun bruit, aucun son, aucun souffle. Elle se rendit compte que, ni ici ni là-bas, elle n’arrivait à rire, à respirer, à se sentir vivante, et qu’elle lévitait dans un mouvement aveugle, chutait dans le vide, sans terre ni ciel."
Esha a quitté Calcutta pour s’installer à Paris, la ville dont elle rêvait. Or, d’année en année les déceptions s’accumulent, tout devient plus sombre et plus violent autour d’elle. Elle s’épuise dans d’innombrables batailles, et ne se sent plus en sécurité.
Issue d’une famille de paysans pauvres, Mina vit près de Calcutta. Par ignorance, ou par crédulité, elle est entraînée à la fois dans un mouvement d’insurrection paysanne qui la dépasse et dans une passion irraisonnée pour son cousin Sam, qui lui fait commettre l’irréparable.
Les destins de Mina et d’Esha se répondent dans ce roman qui ne ménage ni notre société ni la société indienne. L’écriture de Shumona Sinha est animée par la colère, une colère éloquente, aux images aussi suggestives que puissantes.
Revue de presse
- "L’écriture singulière, très poétique, imagée mais néanmoins féroce de Shumona Sinha fait ressurgir une colère. C’est beau et déroutant. Le lecteur sort de ce roman bouleversé par les voix de ces trois femmes, derrière lesquelles on devine très bien ‘lauteure, née à Calcutta en 1973, arrivée à Paris en 2001 pour enseigner l’anglais, féministe et engagée à gauche.” (Lavie Gauthier, Le Soir)
- "Naitre femme, le devenir, y survivre : le roman de Shumona est un cri de colère glaçant.” (Le Canard Enchaîné)
- "Ce roman puissant et nostalgique dénonce l’injustice et la condition des femmes en Inde, le racisme de notre société. Poignant.” (Femina)
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Essais
Les Enfants du vide. Sortons de l’individualisme
Allary Éditions - 2018
« Nous sommes libres, sommes-nous pour autant heureux ? La sourde inquiétude qui nous tenaille vient de l’absence d’horizon collectif, de la crise des récits et des structures qui inscrivaient hier encore l’individu dans un tout. Nos parents ont déconstruits ces récits qui étaient des mythes aliénants, et ils ont eu raison. Mais nous ne pouvons nous contenter du rien qui prit leur place.
Si nos aînés sont arrivés au monde dans une société saturée de sens, nous sommes nés dans le vide. Leur mission était de briser des chaînes, la nôtre sera de retisser des liens.
La démocratie repose sur les droits de chacun, mais pas seulement. La tâche de notre génération sera de nous préoccuper de ce "pas seulement" qui fut trop longtemps délaissé : le droit du tout sur chacun. Car si nous ne le faisons pas, les forces les plus autoritaires le feront à notre place. » R.G.
Dans la lignée de Génération gueule de bois, Raphaël Glucksmann interroge le manque d’horizon collectif des générations élevées dans des sociétés individualistes.
- « Un style vif, fondé sur une culture politique sûre. » Libération
- « Ce passionnant essai dresse un constat cinglant de "la société de solitude" » Le Monde