Roissy
Sabine Wespieser Éditeur
26 mars 2019.
Sans cesse en mouvement, tirant derrière elle sa valise, la narratrice de ce roman va d’un terminal à l’autre, engage des conversations, s’invente des vies, éternelle voyageuse qui pourtant ne montera jamais dans un de ces avions dont le spectacle l’apaise.
Arrivée à Roissy sans mémoire ni passé, elle y est devenue une « indécelable » – une sans domicile fixe déguisée en passagère –, qui a trouvé refuge dans ce non lieu les englobant tous. S’attachant aux êtres croisés dans cet univers fascinant, où personnels navigants ou au sol côtoient clandestins et laissés-pour-compte, instituant habitudes et rituels comme autant de remparts aux bribes de souvenirs qui l’assaillent et l’épouvantent, la femme sans nom fait corps avec l’immense aérogare.
Mais la bulle de sécurité finit par voler en éclats. Et quand un homme, qui tous les jours vient attendre le vol Rio-Paris – le même qui, des années auparavant, s’est abîmé en mer – tente de l’aborder, elle fuit, effrayée. Comprenant, à sa douceur et à son regard blessé, qu’il ne lui fera aucun mal, elle se laissera pourtant aller à la complicité qui se nouera entre eux.
Magnifique portrait de femme rendue à elle-même à la faveur des émotions qui la traversent, Roissy est un livre polyphonique et puissant, qui interroge l’infinie capacité de l’être humain à renaître à soi et au monde.
- « […] Dans toutes ces descriptions, l’atmosphère est parfaitement rendue, saisissante, l’écriture précise, détaillée, poétique toutefois, et même lyrique. […] L’émergence de l’espoir et d’une possible rédemption dans cette sombre fresque, âpre socialement et psychologiquement, est la grande réussite de ce roman. Elle laisse le lecteur sur cette idée qu’une fleur peut toujours éclore quel que soit le terrain sur lequel la graine est tombée. » La Croix
- « Difficile d’oublier Anna, l’héroïne du roman de Tiffany Tavernier. À 51 ans, l’auteure française, fille du cinéaste Bertrand Tavernier, signe sans doute son récit le plus singulier. […] Dans cette intrigue ciselée, Tiffany Tavernier restitue l’univers de ces sans-abri qui vivotent dans les aéroports […]. Une formidable tension règne dans ce récit pétri d’humanité et de pudeur. » Le Parisien Weekend
DERNIER OUVRAGE
Romans
En vérité, Alice
Sabine Wespieser Éditeur - 2024
Aux urgences, Alice se reproche de s’être abîmé le bras en tombant dans la cuisine. Elle aurait dû reculer vers le tapis du salon… Et, quand la médecin lui demande devant qui, devant quoi elle a battu en retraite, la jeune femme esquive. Le diagnostic la désespère : trois semaines avec une atèle, alors qu’ils déménagent à Paris. Et son homme qui ne dort plus, il a tant de problèmes, ils s’aiment si fort. Personne ne la comprend, ni cette praticienne suspicieuse, ni ses amis, ni sa mère, convaincue qu’il finira par la tuer.
Comme souvent dans les romans excellents, tout est dit dès la première scène : reste à savoir si, et comment, Alice parviendra à fuir cette emprise. Mené tambour battant, ponctué de trouées de lumière, même dans les scènes les plus sombres, ce livre nous conduit sur des chemins absolument inattendus : sommée par le monstre avec qui elle vit de trouver du travail, Alice, qui a interrompu ses études de droit quand elle l’a rencontré́ cinq ans auparavant, n’a guère de possibilités. Vendeuse ou serveuse, c’est hors de question pour celui qui la veut toute à lui. La chance lui sourit dans l’église du quartier où, totalement athée pourtant, elle se réfugie lors de ses rares moments de répit. Elle y avise une mystérieuse petite annonce : « L’association diocésaine de Paris recrute un(e) assistant(e) pour le Promotorat des causes des saints. »
À sa grande surprise, l’évêque responsable la recrute à l’issue d’un bref entretien, trop heureux d’avoir enfin trouvé quelqu’un d’apparemment censé – plutôt que les illuminés qui briguaient le poste – pour remettre de l’ordre dans les dossiers délaissés par son prédécesseur. La voilà embarquée, et nous avec elle, dans un univers dont elle ignore tout : il s’agit, comprend-t-elle, d’instruire des candidatures à la canonisation, première étape d’une interminable procédure qui bien sûr doit s’achever à Rome, si elle n’est pas interrompue avant, tant les conditions suspensives sont nombreuses et complexes.
Tout semble jouer en défaveur d’Alice : elle souffre d’une timidité maladive depuis son arrivée à Paris, à l’âge de dix ans, vécue comme l’enfouissement sous une chape de plomb après une enfance radieuse au Guatemala ; son compagnon, excédé de ne plus l’avoir à son entière disposition, lui fait subir un harcèlement constant ; et elle a évidemment bien du mal à comprendre ce que l’on attend d’elle.
Malgré tout, aidée par des prélats et des collègues d’une bienveillance sans limites, elle parvient à se familiariser avec les documents dont elle a la charge, découvrant à leur lecture les destinées extraordinaires de ces « Serviteurs de Dieu », « Vénérables » ou « Bienheureux » qu’il s’agit d’évaluer et dont Tiffany Tavernier ponctue son récit, illuminant dans le même mouvement son texte et le quotidien de sa protagoniste.
À la faveur d’extraordinaires rebondissements, la puissante romancière invite le monde extérieur dans la bulle de déni où s’est réfugiée Alice, l’autorisant à se frayer un chemin vers sa propre vérité. Ce n’est pas là la moindre surprise du formidable portrait de femme qu’elle nous offre, fidèle à sa compassion pour les âmes tourmentées dont elle sait voir la clarté.
- « De la vie des futurs saints parisiens et de l’existence douloureuse d’une femme à bout de souffle, Tiffany Tavernier parvient à faire un roman dense, haletant. Un tour de force quand elle tisse la vie édifiante des bienheureux, la violence d’une emprise conjugale. Deux angles qui se rejoignent pourtant, avec la question impérative qui traverse le livre : quel sens peut avoir le sacrifice de soi-même ? Jusqu’où peut mener l’amour ? » La Croix
- « C’est un peu Kafka à l’Église. La pesanteur de procédures administratives au cœur du religieux. Dans son nouveau roman, Tiffany Tavernier nous plonge dans un monde méconnu, celui des bureaux chargés d’instruire les candidatures à la canonisation. » La Tribune
- « Un très très beau roman, Tiffany Tavernier est une brillante romancière qui nous livre un roman haletant et extrêmement bien documenté » France 2
- « Tiffany Tavernier, remarquée pour Roissy (Sabine Wespieser éditeur) analyse la dépendance à l’égard d’un homme violent et le déni, parallèlement à la découverte d’un monde catholique bienveillant. Sa fascination pour le processus visant à instruire une candidature à la canonisation aboutit à une documentation formidable qui réjouira ceux qui s’interrogent. » Le Pèlerin