VERHEGGEN Jean-Pierre

Belgique

6 mars 2012.
 

Biographie

Jean-Pierre Verheggen
© J. Sassie - Gallimard

Si vous pensiez que l’humour n’est pas le propre de la poésie de langue française, les textes du belge Jean-Pierre Verheggen risquent bien de vous faire changer d’avis. Sa poésie, incessant remaniement de la langue, avec ses calembours, sa part de dérision et de trivialité, ne manque jamais de susciter le rire.

Le poète joue des sonorités de la langue française, sous sa plume les mots virevoltent, s’entrechoquent, se créent parfois, les idées fusent, les concepts se côtoient : « la langue est le personnage principal de mes textes », dit-il. Son écriture est avant tout une parodie sans complexe de la poésie, un pastiche burlesque des conventions du genre. Ainsi se moquant, il interpelle la littérature (de la bande dessinée belge aux grands classiques de la littérature francophone et des arts), et le monde culturel et politique. Il a reçu, en 1995, le Grand Prix de l’Humour Noir pour Ridiculum vitae et pour l’ensemble de son œuvre.

Né près de Namur en 1942, ancien professeur de français, il a participé dans les années 1970 à la revue d’avant-garde TXT, a été conseiller en 1990 du Ministre de la culture Valmy-Féaux, et chargé de mission spéciale à la promotion des Lettres françaises de Belgique en 1992… mais avant tout il est poète, poète phénomène, poète énergumène, inventeur d’un genre nouveau : l’opéra-bouche qui produit l’ouïssance, à la fois jouissance de l’oreille et jouissance par l’oreille. Les textes de Jean-Pierre Verheggen sont faits pour la lecture à voix haute : pour Jacques Bonnaffé, interprète et metteur en scène de son spectacle « L’Oral et Hardi » en 2009, « L’écriture de Jean-Pierre est un art primitif, son usage une incantation ».

En 2011, il revient avec le recueil Poète bin qu’oui, poète bin qu’non ?, attestant encore une fois de son goût pour les titres alambiqués, les détournements et le décalage. Cette même année, il confirme le grand talent qui est le sien en remportant le prix Robert Ganzo de Poésie pour l’ensemble de son œuvre lors du festival Étonnants Voyageurs. Pierre Verheggen pose sur le monde un rire joyeux et moqueur, fait tomber de son piédestal l’image du poète en maniant haut et bas langage, érudition implicite et calembour à outrance, faisant de Poète bin qu’oui, poète bin qu’non ? et de ses "36 poèmes pour 36 sortes de poètes", une œuvre ouverte et généreuse.


Bibliographie :


Présentation de Poète bin qu’oui, poète bin qu’on :

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« Il y a 36 sortes de poètes : champêtres ou rodomonts, Peuls ou Auvergnats voire ambigus et ambidextres à la fois ! Il y a parmi eux des alcoolos, des mycologues, des indécis, des kamikazes, des inconnus et des curés de leur propre petite gloire locale personnelle ! Sans oublier les agités du buccal et les centaines d’autres espèces. Poète moi-même – peut-être ? (la question reste ouverte) – j’en ai tiré quelques portraits, le plus souvent au tir à têtes de pipes. C’est que je n’attache jamais ma censure quand je conduis mon autodérision ! Me voici donc fonçant à vive allure sur l’âge ingrat qu’est la vieillesse pour lui rappeler que je suis et veux rester une « persona non gaga » ou plus loin écrasant sans vergogne quelques nouveau-nés choisis parmi nos récents néologismes abscons et technico-bluffeurs venus, une fois encore, s’embourber dans notre langue : procrastination, locophage (ou locavore : au choix !) accidentogène et buvabilité, etc. Pan ! Sans le moindre coup de frein ! Pan dans le mille ! » J.-P. V.

« Hilarante anthologie de toutes les figures de poètes. De celui du dimanche, plein de son lyrisme considéré comme amour universel, au déjanté fou, au dangereux manipulateur de mots et au puant du bec, comme disait Ferré. Bien sûr, il s’agit de lire là subtile dérision et auto- dérision dans un monde si bavard... » JS, La Liberté, avril 2011

Présentation de Sodome et Grammaire :

Ou Sodome et Grosso Modo si l’on préfère ! Nous sommes en effet en Presque- Poésie. A l’orée. A l’oreille et Hardy comme il a déjà été dit et redit. Aux bords. Aux confins : entre à-peu-près, pataquès, persiflage - voire franche provocation ! - et joyeuse parodie. Aux limites imprécises. Là où les frontières sont tantôt floues tantôt fluides. Là où également tous les coups sont permis pourvu qu’ils mettent en évidence les infinies ressources de notre belle langue française tout en la défendant contre qui la voudrait aujourd’hui plus démunie et déshumanisée que jamais ou davantage surchargée de préciosités ridicules.
Un uppercut donc - à la Cravan, s’entend ! - aux rappeurs Camembert ; un swing ou deux savates aux slammeurs pompiers ; une claque en passant à la novlangue technologique ; une solide peignée au branchouille mode d’emploi sans oublier une chiquenaude amicale aux grands ancêtres d’anthologie car nul n’est parfait, n’est-ce pas ?
Surtout pas l’auteur qui dans une ultime pirouette d’autodérision prend congé de lui-même en s’exclamant : salut l’Autiste ! Salut !