GAUDY Hélène

France

10 mai 2020.

Avec son écriture fine, élégante, Hélène Gaudy explore des thématiques multiples : celle de la mémoire, du souvenir, des lieux qui s’échappent, de l’adolescence, du rapport aux autres, mais aussi de la photographie qui lui sert aussi bien de support que de processus créatif. Prolifique, membre du collectif Inculte, elle a aussi signé plus d’une dizaine d’ouvrages pour la jeunesse et des livres d’art. Son dernier roman reconstitue l’expédition extraordinaire de trois Suédois ayant décidé de rallier le pôle Nord en ballon en 1897. Ils ne rentreront jamais chez eux. C’est en découvrant des photos de l’expédition au musée Louisiana de Copenhague, que l’autrice décide d’écrire sur cette expédition vouée à l’échec. À travers les saveurs de l’anecdote scientifique de ce voyage opiniâtre et des descriptions solaires des étendues blanches du grand Nord, Hélène Gaudy livre un roman au lyrisme éveillé… et une déclaration d’amour à la photographie dans ses deux mouvements d’aval et d’amont : fixer les souvenirs et réactiver perpétuellement la machine à rêves.

 

Bibliographie

 

DERNIER OUVRAGE

 
Romans

Un monde sans rivage

Actes Sud - 2019

À l’été 1930, sur l’île Blanche, la plus reculée de l’archipel du Svalbard, une exceptionnelle fonte des glaces dévoile des corps et les restes d’un campement de fortune. Ainsi se résout un mystère en suspens depuis trente-trois ans : en 1897, Salomon August Andrée, Knut Frænkel et Nils Strindberg s’élevaient dans les airs, déterminés à atteindre le pôle Nord en ballon – et disparaissaient. Parmi les vestiges, on exhume des rouleaux de pellicule abîmés qui vont miraculeusement devenir des images.

À partir de ces photographies au noir et blanc lunaire et du journal de bord de l’expédition, Hélène Gaudy imagine la grande aventure d’un envol et d’une errance. Ces trois hommes seuls sur la banquise, très moyennement préparés, ballottés par un paysage mobile, tenaillés jusqu’à l’absurde par la joie de la découverte et l’ambition de la postérité, incarnent l’insatiable curiosité humaine qui pousse à parcourir, décrire, circonscrire et finalement rétrécir le monde. Livre d’une richesse inépuisable, aussi poétique que passionnant, Un monde sans rivage propose un voyage opiniâtre dans les étendues blanches du Grand Nord, un périple à travers le temps en compagnie de ces trois explorateurs et de bien d’autres intrépides, une méditation sur l’effacement et une déclaration d’amour à la photographie dans ses deux mouvements d’aval et d’amont : fixer les souvenirs et réactiver perpétuellement la machine à rêves.


Hélène Gaudy à propos de son roman

« Le premier désir est venu d’une série d’images retrouvées sur l’île la plus proche du pôle Nord : trois explorateurs littéralement tombés du ciel dérivent avec la banquise. À travers l’épaisseur du temps, ils nous dévisagent. Si toute photo­graphie est l’empreinte d’un corps traversé par la lumière, celles-ci, qui ont si longtemps séjourné dans la glace, sont aussi la trace directe, physique, d’un paysage. Elles me happent par leur présence spectrale, leurs zones d’ombre qui sont déjà le début d’un roman.

Quelque chose semble me relier à ces explo­rateurs de la fin du xixe siècle, en quête d’un Nord magnétique et fragile, dont je ne distingue encore que les silhouettes mangées par la lumière. Il faut creuser à travers le minimum visible, faire de l’écriture un révélateur pour dévoiler peu à peu leurs visages, leurs espoirs, leurs amours et leurs mensonges, leur curiosité insatiable et leur amateurisme héroïque jusqu’à la poésie, il faut chercher les sensations communes, partager ce qui les maintient en vie, en faire des compagnons – peu à peu, des personnages. Du soleil de minuit à la complète nuit polaire, tenter d’éclairer l’énigme de leur disparition.

En suivant leur marche sur la glace, on croise d’autres tentatives d’élargir le monde au risque de se faire avaler par ses marges. Leur parcours devient une ligne de faille dont partent des embranchements multiples, qui finiront par me mener jusqu’à l’archipel du Svalbard, au seuil de ce Grand Nord qui, lui aussi, s’évanouit.

Certaines histoires poussent à partir loin avant de revenir au plus proche, au plus intime. Les traces de ces trois hommes réveillent peu à peu le manque de ceux qui partent et des lieux dont on rêve, le souvenir d’un temps où l’on croyait encore à la nécessité de l’aventure et à la permanence des paysages. Et la fascination se mue en écriture, et l’image entraîne le roman. »


Revue de presse