La nuit est tombée sur Port-au-Prince

Souvenirs de Grégoire Leménager à Haïti

9 mars 2020.
 

Dans Le Nouvel Obs

Dans la cour bondée de l’Institut français, plus personne ne semble entendre les inévitables klaxons venus de la rue : Dany Laferrière, Alain Mabanckou, Arthur H et Michel Le Bris parlent de la « force magique des mots ». Ailleurs ce genre de réjouissances attire d’augustes rombières, des expatriés, des notables locaux. Pas en Haïti. Comme pour toutes les rencontres organisées par le festival Étonnants Voyageurs, le public est surtout composé de jeunes gens d’une vingtaine d’années qui se disent poètes et plus ou moins étudiants, vivent de petits boulots, trimballent leurs vers sur des feuilles volantes, posent des rafales de questions en vous citant Baudelaire, Kateb Yacine, George Steiner, Gabriel Garcia Marquez, Maurice Grevisse. Et tant pis s’il n’y a que deux cents chaises. On se tient sur les côtés, au fond, accroupi, debout pour écouter Laferrière avec des yeux qui brillent de recueillement, d’admiration et de convoitise.