dimanche
17:15-18:00
Construction de soi
Avec : Thomas C. WILLIAMS, Odéric DELACHENAL, Beata UMUBYEYI MAIRESSE
20 mai 2021.
Identité, exil, mémoire, transmission, résilience... Comment se construit-on en tant d’être humain. Comment se dégager des préjugés, du poids d’une communauté, d’une histoire. Comment les tragiques épreuves de vie nous fissurent tout en nous amenant à nous redéfinir. Et tout simplement trouver sa place dans le monde. Thomas Chatterton Williams raconte son cheminement identitaire dans la société française contemporaine. Il envoie dos à dos racisme ordinaire et antiracisme communautariste et s’emploie à déconstruire les préjugés avec, pour perspective, l’avènement d’une société post-raciale. Dans Fissuré (Métailié, 2021), Odéric Delachenal examine les contradictions et les cicatrices de ceux qui rêvent d’aider, de changer le monde, et qui se rendent compte qu’ils sont à peine des minuscules pansements. Écrivaine rwando-française, Beata Umubyeyi- Mairesse a grandi au Rwanda. À l’âge de 15 ans, elle échappe au génocide des Tutsis et arrive en France en 1994. Tous tes enfants dispersés raconte l’histoire d’une famille meurtrie par le drame rwandais, où trois générations se retrouvent et tentent de dépasser le silence et renouer les liens, par-delà les fantômes du passé.
DERNIER OUVRAGE
Essais
Autoportrait en noir et blanc
Grasset - 2021
Avec cet émouvant Autoportrait en noir et blanc, Thomas Chatterton Williams explore la question de l’identité en prenant pour point de départ la naissance de sa fille aînée, Marlow. Dans une maternité parisienne, lorsqu’il voit pour la première fois la petite tête blonde et les grands yeux bleus de son bébé, Williams, lui-même « métis », pense à tous les gens qui voudront la désigner comme « blanche ». Assigner sa fille à une « race » a-t-il un sens alors que ses gènes et ses héritages culturels sont multiples ?
Afin de répondre à cette question, l’auteur conduit une réflexion nourrie par son expérience et ses lectures, pour défendre l’idée d’une société post-raciale. Il fait par exemple un test ADN afin d’objectiver ses origines et finalement découvrir qu’il n’est qu’à 39,9% d’origine sub-saharienne. Le « premier président américain noir » n’est-il pas en réalité, lui aussi, « métis » ?
Thomas Chatterton Williams réfléchit ainsi à une fluidité de la « race », en fonction du regard de l’autre, d’un espace géographique ou d’une époque, et cherche à balayer toute tentation de cloisonner l’identité.
Texte incisif mais également lettre d’amour à ses enfants, cet autoportrait raconte le cheminement identitaire d’un père américain dans la société française contemporaine. Après Une soudaine liberté, Thomas Chatterton Williams s’inscrit plus que jamais dans le débat intellectuel d’aujourd’hui.
Traduit de l’anglais (États-Unis) par Colin Reingewirtz
DERNIER OUVRAGE
Témoignage
Fissuré
Métailié, 2021 - 2021
Odéric Delachenal a vécu en Haïti de 2008 à 2010. Il travaille pour la délégation catholique pour la coopération. Le 12 janvier 2010, à 16:53:10, il vit le grand séisme de Port-au-Prince. Cet après-midi-là, la capitale s’effondre avec lui. Alors, sans relâche, le jeune éducateur erre dans des décombres de fin du monde. Protéger, rassembler les enfants épars pour les mettre à l’abri. Courir la ville écrasée, en quête des siens. Soigner, secourir, fouiller les gravats, tirer des bâches sur les parkings-dortoirs. Il arpente la ville exsangue, à la recherche de ses amis, des enfants qu’il est « censé » protéger.
Comment se détacher du pire quand, atteint au cœur, on est désem- paré ? Comment continuer lorsqu’on rentre en France, « ce pays en paix », et qu’on s’immerge dans l’absurdité d’un travail social où on doit « trier » les enfants migrants auprès de la Protection de l’en- fance ? L’auteur examine ici, avec une sincérité déchirante, les con- tradictions et les cicatrices de ceux qui rêvent d’aider, de changer le monde, et qui se rendent compte qu’ils sont à peine des minuscules pansements, hantés par la brutalité de leur insignifiance, de ce qu’ils ont vu et de ce qu’ils côtoient au quotidien. Comment refuser à ceux qui se noient quand ce sont les villes entières qui s’abîment… ?
Dix ans après son expérience à Haïti, l’auteur lit Dany Laferrière et comprend qu’il y a des gens comme des maisons « qui sont profondé- ment fissurés à l’intérieur et qui ne le savent pas encore… [ceux-ci] sont les plus inquiétants, le corps va continuer un moment, avant de tomber en morceaux un beau jour. Brutalement. Sans un cri ».
Odéric Delachenal décide donc de témoigner, de mettre son cata- clysme en mots avec une force narrative magistrale, de montrer l’en- vers du décor du costume du bon Samaritain, au nom des vivants comme des morts, au nom de ses amis haïtiens qui versaient tous les matins une goutte de café à terre pour tous ceux qui étaient partis.
DERNIER OUVRAGE
Récit
Le convoi
Flammarion - 2024
"Il aura fallu quinze ans de cheminement incertain, une enquête menée aux confins de mémoires étiolées, pour retrouver une image sur laquelle j’espérais figurer, puis pour chercher mes compagnons de fuite. Quinze ans pour m’autoriser enfin à écrire cette histoire. La mienne et à travers elle, car il s’agit bien de me réinscrire dans un collectif, la nôtre, l’histoire des enfants des convois."
Le 18 juin 1994, quelques semaines avant la fin du génocide des Tutsi au Rwanda, Beata Umubyeyi Mairesse, alors adolescente, a eu la vie sauve grâce à un convoi humanitaire suisse. Treize ans après les faits, elle entre en contact avec l’équipe de la BBC qui a filmé et photographié ce convoi. Commence alors une enquête acharnée (entre le Rwanda, le Royaume-Uni, la Suisse, la France, l’Italie et l’Afrique du Sud) pour recomposer les événements auprès des témoins encore vivants : rescapés, humanitaires, journalistes. Le génocide des Tutsi, comme d’autres faits historiques africains, a été principalement raconté au monde à travers des images et des interprétations occidentales, faisant parfois des victimes les figurants de leur propre histoire. Nourri de réflexions sur l’acte de témoigner et la valeur des traces, entre recherche d’archives et écriture de soi, Le convoi est un livre sobre et bouleversant : il offre une contribution essentielle à la réappropriation et à la transmission de cette mémoire collective.
- « Le Convoi est un grand livre, presque intimidant par son autorité souveraine, par ce qu’il dit tout autant que par la manière dont il le dit. » Livres Hebdo
- « Le Convoi raconte ce sauvetage, ou plutôt il en cherche les traces. Auprès des journalistes comme des humanitaires, Beata Umubyeyi Mairesse part en quête d’images, rushs de reportage, photos oubliées, clichés ambigus… Quête souvent entravée mais riche en surprises. Quand le récit s’ouvre, en effet, l’autrice affirme vouloir en partager les fruits avec d’autres enfants du convoi. Lorsqu’on referme le livre, on saisit que l’essentiel, pour cette métisse à la fois « transfuge de classe et de race », était de se ménager une place parmi eux, de se forger une légitimité, d’être pleinement reconnue comme survivante parmi les survivants. » Le Monde
- « Rwanda, 1994. Menacés de mort, un millier d’enfants tutsi sont exfiltrés. Parmi eux, Beata Umubyeyi Mairesse. Elle en fait le récit et l’analyse, au nom de tous, pour que soit enfin entendue la parole des victimes du génocide. » Télérama
- « Beata Umubyeyi Mairesse dénoue les fils de ce passé effrayant et nous aide а changer de regard sur cette terrible tragédie humaine. » La Croix
- « Un récit fascinant qui se déploie dans le labyrinthe de la mémoire, interroge sans cesse le sens et la réalité des mots. » Libération
- « Des mots d’une grande précision, d’une grande sobriété, d’une grande humanité aussi. » RFI
- « Ce livre est une plongée dans les noirceurs de l’humanité, une profonde réflexion sur le bien et le mal. » Ouest-France