NIVAT Anne

France

22 février 2018.

Dans la lignée des grands reporters écrivains Albert Londres ou Joseph Kessel, cette grande spécialiste de la Russie, publie des ouvrages au confluent du reportage, du témoignage et de la littérature. Après avoir couvert la guerre en Tchétchénie, en Afghanistan, en Irak, elle part dans Un continent derrière Poutine ?, à la rencontre de ces citoyens russes qui soutiennent sans faille le dirigeant russe depuis 1999. Un livre, et un film, édifiants.

 

Dans la lignée des grands reporters écrivains Albert Londres ou Joseph Kessel, cette grande spécialiste de la Russie, publie des ouvrages au confluent du reportage, du témoignage et de la littérature. Ils évoquent également l’œuvre de son amie Anna Politovskaïa, assassinée en 2006 pour ses écrits sur la guerre de Tchétchénie.

Née en 1969, docteur en sciences politiques et spécialiste de la Russie, Anne Nivat devient, à partir de 1998, correspondante à Moscou pour des titres de presse francophone tels que Libération, Ouest-France, Le Soir, Le Point, la radio RMC, ainsi que pour des journaux anglo-saxons. De 1999 à 2001, elle couvre la guerre de Tchétchénie pour le journal Libération. Après cette première expérience de reportage de guerre, Anne Nivat poursuit son travail de journaliste indépendante sur les terrains les plus violents de la planète. De l’Afghanistan à l’Irak, en passant par le Pakistan, elle rend compte du monde à sa façon : en donnant la parole à ceux qui ne l’ont pas et en revendiquant le droit à la lenteur et à la complexité, en refusant la précipitation, les stéréotypes et la course au scoop.

Son travail littéraire commence en 2000, avec Chienne de Guerre, un témoignage exceptionnel sur son expérience tchétchène qui lui vaut le prix Albert-Londres. En collaboration avec Louisette Ighilahriz, elle publie en 2001, Algérienne, un ouvrage qui évoque les tortures perpétrées pendant la guerre d’Algérie. S’ensuit, en 2004, Lendemains de Guerre en Afghanistan et en Irak pour lequel elle reçoit le prix littéraire de l’armée de terre - Erwan Bergot. En 2005 et 2006, elle poursuit sa quête de la parole de l’autre avec Islamistes, comment ils nous voient et Par les monts et les plaines d’Asie Centrale. En 2008, elle propose avec Bagdad, Zone Rouge, une immersion au cœur de la réalité quotidienne des hommes et des femmes de Bagdad plongés dans la terreur de cette « zone rouge ». C’est la passion pour le quotidien exceptionnel des populations vivant dans la guerre qui la pousse à replonger au coeur de l’Afghanistan, en 2011, aux côtés de soldats canadiens ou, incognito, sous le voile du châdri près des villageois afghans. Elle livre ainsi, avec Les Brouillards de la guerre : Dernière mission en Afghanistan, un récit passionnant sur un pays en proie aux flammes. Faisant « partager au plus grand nombre l’enfer vécu au loin », la voix d’Anne Nivat constitue un témoignage précieux pour comprendre la réalité humaine des conflits contemporains.

En 2013, elle revient avec La République Juive de Staline, une enquête consacrée au Birobidjan, ce territoire des confins orientaux de la Russie, attribué en 1934 par Staline à la minorité juive d’URSS. Il aura fallu cinq ans d’enquête dans l’Extrême-Orient russe pour qu’Anne Nivat parvienne à mettre bout à bout toutes les informations récoltées à propos de ce territoire. Une enquête monumentale, nourrie de nombreux témoignages. Anne Nivat nous fait également l’honneur de présenter son documentaire Irak, l’ombre de la guerre, qui prolonge la réflexion sur ce pays déjà engagée en 2004 dans Lendemains de Guerre en Afghanistan et en Irak. Un film documentaire saisissant sur une situation géopolitique en passe de devenir inextricable.

Pour la première fois, Anne Nivat se tourne vers la France et publie Dans quelle France on vit (Fayard, 2017), recueil de témoignages sur la France qui ne s’exprime pas. Pour récolter ces témoignages, elle est allée à la rencontre des Français à qui on ne donne jamais la parole, dans des villes de taille moyenne qui bénéficient de peu de couverture médiatique : Evreux, Nantes, Laval… Logée chez l’habitant, elle a suivi ces gens dans leur quotidien et s’est entretenue avec eux de sujets de société tels que
le sentiment de déclassement, le chômage, l’identité, le malaise des jeunes, l’insécurité, les services public ou encore le racisme. Un récit sur des enjeux politiques brûlants.

Alors que les électeurs russes se prononcent sur la candidature de Poutine en mars 2018, elle fait paraître un film et un livre, Un continent derrière Poutine ?, dans lesquels elle part à la rencontre de ces citoyens qui soutiennent sans faille le dirigeant russe depuis 1999.


Bibliographie

Documentaires :

En anglais

 

DERNIER OUVRAGE

 
Essais

Un continent derrière Poutine ?

Seuil - 2018

En mars 2018, au moment de la publication du livre, le peuple russe se prononcera sur la réélection de Vladimir Poutine à la tête du pays. Selon toute probabilité, alors que sa personnalité suscite débat et controverse à l’extérieur de ses frontières, mais aussi dans certains cercles en Russie, cette réélection sera une formalité. Par le choix subjectif de quelques rencontres sans tabou, ces portraits de plusieurs familles ou couples montreront le peuple dans sa complexité, donneront à voir en quoi Vladimir Poutine l’a fait évoluer, à travers une palette de points de vues réalistes. Et pas seulement dans les zones urbaines ni exclusivement dans la Russie occidentale. A travers ces portraits, Anne Nivat raconte en quoi ce pays n’est pas tout à fait celui qu’on nous décrit en Occident. En quoi voter Poutine n’est pas, dans la tête des Russes, forcément voter pour un “dictateur”. Montrer l’étendue des possibilités et des situations dans cet immense pays, en commençant par l’extrême-est pour remonter, comme, en son temps, le Nobel de littérature Vladimir Soljenitsyne, jusqu’à sa partie européenne. Conter la vie des Russes ordinaires baignés dans le système “poutinien”, évoquer l’attitude “compréhensive” vis-à-vis de la corruption, la fin de l’humiliation versus la stabilité du pouvoir, pourquoi même les opposants ne remettent pas en cause l’annexion de la Crimée, le post-capitalisme…