BORER Alain

France

17 avril 2024.

Poète, critique d’art, essayiste, romancier et dramaturge, il est un spécialiste mondialement reconnu d’Arthur Rimbaud, dont il a suivi les traces jusqu’à Harar en Éthiopie. Cet écrivain est un fidèle du festival, signataire du manifeste Pour une littérature monde en français et président du prix Ganzo de poésie. Son dernier ouvrage, Speak white ! Pourquoi renoncer au bonheur de parler français ? propose une réflexion sur le devenir de la langue française : mise en péril par les expressions anglophones, elle doit être préservée pour ne pas devenir un dialecte de l’empire anglo-saxon.

 

Pendant trente ans sur les traces d’Arthur Rimbaud, de la lecture de ses poèmes à la découverte de ses derniers instants de vie en Éthiopie, Alain Borer est un romantique pour qui le voyage se conjugue toujours avec l’aventure. Ce grand ami d’Hugo Pratt et de Léo Ferré est un écrivain aux multiples facettes : romancier, essayiste, dramaturge, professeur d’enseignement artistique à l’École des Beaux-arts de Tours-Angers-Le Mans (site de Tours) et visiting professor à USC Los Angeles, il décide à 37 ans de faire évoluer son œuvre : après des ouvrages très remarqués comme Rimbaud en Abyssinie, il choisit de quitter son idole avec un dernier livre, Adieu à Rimbaud.

C’est donc lors de sa seconde carrière d’écrivain qu’Alain Borer se révèle en tant que romancier de talent. Avec Koba, il signe un premier roman foisonnant, d’une splendeur d’écriture et d’une ambition rares, mettant en scène un bûcheron géorgien, Koba, chef des Abreks, parti à la recherche des dieux pour les exterminer. Koba a obtenu le Prix Joseph Kessel en 2003. Il s’essaie aussi avec succès au théâtre : sa pièce Icare & I don’t a été couronnée du 70e prix Apollinaire, et il a reçu le prix Édouard Glissant décerné par l’Université Paris-VIII pour l’ensemble de son œuvre. Mais c’est peut-être Roland Barthes qui lui rend le plus bel hommage lorsqu’il déclare : « Chez vous l’art de vivre et l’art d’écrire se confondent ».

En 2010, il publie Le ciel & la carte (Seuil), une allégorie sur l’enfer et un poème approfondi sur le paradis, une farce hilaro-tragique à surprises multiples qui délivre, au passage, une analyse politique percutante sur les essais nucléaires, ou l’invention par Bougainville du paradis moderne.

Poète, Alain Borer est en recherche de ce qu’il appelle le noème, forme de signification qui caractérise la « poésie » en sept propriétés (à paraître : Pour l’amour du ciel, recueil, L’Être à gué, 435 noèmes), concept qu’il développe en un Traité du noème, paru jusqu’à présent en diverses revues, et qu’il utilise également dans sa critique d’art (Villeglé l’anarchiviste, Gallimard, 2019).

Son livre, De quel amour blessée, tient son titre d’un de ces vers de Phèdre à Œnone dans le premier acte de la tragédie de Racine : « Ariane, ma sœur ! de quel amour blessée/Vous mourûtes aux bords où vous fûtes laissée ! » Alain Borer, telle une vigie de la langue, y livre une splendide ode à la langue française, celle de son enfance, sans cesse réapprise. Selon lui, la langue française se meurt, en proie à un « anglobal » qui, à force de dé-nomination et de dé-sinvention, engloutit toutes nuances et avec elles toute une civilisation. À travers ce chant d’amour de la langue française et à partir de la lente histoire de sa construction, le lecteur, en redécouvrant avec jubilation la complexité de sa langue, aura peut-être à cœur le beau souci des mots.


Le site d’Alain Borer


Bibliographie

 

DERNIER OUVRAGE

 
Essais

« Speak white ! » Pourquoi renoncer au bonheur de parler français ?

Gallimard - 2021

Les langues savent sur nous des choses que nous ignorons. Elles diffèrent non par les mots, qui voyagent et s’échangent par familles, mais par leurs idéalisations collectives, logées dans leur morphologie. Aujourd’hui, la langue française est en passe de s’effondrer en une sorte de dialecte de l’empire anglo-saxon — ce qui implique un autre Réel, autant qu’un infléchissement collectif des visions du monde et des relations humaines, dont aucun politique, semble-t-il, n’a la première idée. « Speak white ! », partout résonne l’injonction de parler la langue du maître : nous soumettrons-nous ? Mais pourquoi renoncer au bonheur de parler français ?