Méditerranée des deux rives

Avec Yasmine Char, Paolo Rumiz, Maram Al Masri, Takis Theodoropoulos

14 juin 2012.
 

Une rencontre entre Yasmine Char, Paolo Rumiz, Maram Al Masri, Takis Theodoropoulos, animée par Yann Nicol.

 

DERNIER OUVRAGE

 

Le phare : Voyage immobile

Hoëbeke - 2015

Paolo Rumiz pour son nouveau livre a fait un voyage auquel même lui sans doute ne s’attendait pas. Lui qui a longé les 6 000 kilomètres des frontières de l’Europe du nord au sud, traversé les Balkans, franchi les montages à la recherche d’Hannibal, ramé tout au long du fleuve le Pô, lui, le grand voyageur italien, décide de vivre et de nous faire vivre son premier voyage immobile dans un phare perdu au milieu de la Méditerranée, loin de tout et de tous, hormis les gardiens.
Soudain libéré de tout contact avec le monde extérieur – il n’a ni radio, ni télé, ni internet, ni même un téléphone – il se consacre, quand le temps le permet, à l’exploration de son environnement plutôt réduit puisque le phare est perché sur un récif où il n’y a aucune autre habitation. Il nous présente donc tour à tour la nature, la faune domestique (il y a quand même un âne et une poule) et la faune sauvage (dominée par les innombrables oiseaux), les poissons, le bâtiment où il loge, ceux qui l’habitent ou qui l’ont habité jadis, sans oublier d’autres occupants de phares qu’il a connus dans son enfance, il nous parle du temps qu’il fait, des vents, des bateaux qui passent, de ses pensées, de ce qu’il mange et de bien d’autres choses encore. Bref, il nous dit tout, sauf le nom de cet archipel mystérieux, qu’il tient à cacher, de peur d’y voir déferler des hordes béotiennes. Il livre certes quelques indices, mais ceux-ci amènent le lecteur à se demander si la vérité ne serait pas plus compliquée qu’il n’y paraît et à conclure que le phare du récit pourrait bien être, en réalité, un savant amalgame d’expériences diverses. En tout cas, le récit est prenant, et inoubliable. C’est avec une indéniable volupté que ceux qui rêvent d’une tour d’ivoire se laisseront entraîner jusqu’à ce lieu austère, à l’écart du monde, même s’il faut en repartir.

 

DERNIER OUVRAGE

 
Récit

Elle va nue, la liberté

Bruno Doucey - 2013

Maram al-Masri est l’exilée d’un pays-blessure qui saigne en elle. Petite mère d’orphelins. Funambule toujours sur le fil entre tristesse et espérance. Je l’ai vue se vêtir du drapeau de son pays, incarnant la Syrie martyrisée ; glisser son portable sous son oreiller, ne plus respirer, ensevelie sous ses morts. Depuis que la révolution syrienne a éclaté, Maram guette chaque jour les vidéos sur Facebook ou YouTube. Ainsi sont nés les poèmes de ce recueil. Ils ne cherchent pas à apprivoiser les images de l’horreur, ils nous les donnent à voir. Là, une mère porte en terre son enfant. Ici, un enfant figé près du cadavre de ses parents. Et ces caisses de bois nu qui dansent, dansent… La journaliste que je suis s’incline devant cette incomparable puissance d’évocation. Ce carnet intime d’une douleur n’a pas fini de nous hanter.