L’Europe s’invente à Sarajevo

Avec Igor Šticks, Drago Jancar, Velibor Colic, Nedim Gürsel

14 juin 2012.
 

Rencontre avec Igor Šticks, Drago Jancar, Velibor Colic, Nedim Gürsel, animée par Yann Nicol

 

DERNIER OUVRAGE

 
Récit

Guerre et pluie

Gallimard - 2024

Velibor Colic a en n écrit le récit de sa guerre, celle qu’il a vécue en 1992, depuis son enrôlement dans l’armée croato-bosniaque lors de l’invasion de la Bosnie par l’armée fédérale ex-yougoslave tenue par les Serbes, jusqu’à sa désertion, qui a marqué le début de sa vie en exil. Il l’avait évoqué dans son tout premier livre, Les Bosniaques, série de brefs récits de guerre, écrit en serbo-croate. C’est ici un projet d’une toute autre ampleur. La première partie raconte l’apparition, vers 2020, alors que l’auteur vit à Bruxelles, d’une maladie rare, provoquant l’éclosion de cloques douloureuses sur le corps et dans la bouche, qui fait revenir à sa mémoire les images des corps en déchéance. Il comprend aussi que si sa langue est attaquée par des aphtes purulents, c’est qu’il a dû s’arracher à sa langue maternelle pour venir habiter le français : le corps dit toutes ces déchirures. La deuxième partie évoque de façon saisissante la vie du jeune soldat de 28 ans jeté dans un univers d’épouvante : la guerre détruit les hommes, mais aussi les animaux, les arbres, tout ce monde de beauté paisible qui avait été le sien. La troisième partie raconte comment, ayant décidé de déserter, l’auteur a réussi à échapper à la guerre, au prix du deuil de tout ce qui avait fait sa vie jusqu’alors.« La mémoire parle une langue étrangère dont nous ne maîtrisons pas tous les signes », écrit Colic. C’est ce qui donne à ce récit son caractère à la fois halluciné et drolatique. L’horreur des tranchées, la déréliction des soldats, les souffrances, tout cet univers d’e4roi où aucune loi n’existe, est contrebalancé par la douceur merveilleuse des souvenirs d’avant – en particulier des souvenirs amoureux, évoqués avec une délicatesse et une poésie qui subjuguent. L’auteur se décrit avec une autodérision parfois enfiévrée de colère, comme un colosse branlant. C’est un livre de révolte mais aussi, paradoxalement, un livre plein de tendresse et de drôlerie, car l’auteur ne se départit jamais de son penchant pour les aphorismes sarcastiques ou absurdes. Ce grand livre est d’autant plus puissant qu’il résonne terriblement avec ce qui se passe aujourd’hui en Ukraine.


 

DERNIER OUVRAGE

 
Romans

Le fils du capitaine

Seuil - 2016

Sur ses vieux jours, un ancien journaliste relate au magnétophone les événements importants de sa vie. Élevé par sa grand-mère, sous la férule d’un père militaire, autocratique et bambocheur qui soutiendra le coup d’État de 1960, il passe une grande partie de sa scolarité comme interne boursier au un lycée Galatasaray d’Istanbul. Ces souvenirs d’enfance et d’adolescence sont marqués par l’absence de la mère, morte lorsque le narrateur était très jeune, par la tyrannie et parfois la brutalité du père, par la réclusion entre les murs du lycée que la camaraderie, les blagues de potache, l’éveil de la sexualité rendent un peu moins pénibles. Dans ce récit tour à tour drôle, amer et cynique, émaillé de considérations sur la Turquie d’aujourd’hui et son président, affleure à chaque page une rébellion à peine voilée contre l’autorité, qu’elle soit paternelle ou étatique.
Un livre émouvant, qui plonge dans la mémoire intime d’un homme épris de liberté, et rappelle les premiers romans de l’auteur.

 

DERNIER OUVRAGE

 
Romans

Six mois dans la vie de Ciril

Phébus - 2016

Un matin, Ciril joue la Marche Turque de Mozart dans le métro de Vienne et croise l’étonnant Štefan Dobernik – Slovène comme lui. En quelques secondes, la vie du jeune violoniste bascule. Le lendemain, il rentre à Ljubljana dans la voiture de Štefan et devient son plus proche conseiller au sein de l’énigmatique D & P Investments. Là, il retrouve ses rêves et ses amours d’étudiants, passés au moulin du temps. Son épopée dérisoire ne dure que six mois, mais ceux-ci veulent tout dire...

Après Cette nuit, je l’ai vue (Prix du meilleur livre étranger 2014), le nouveau roman de Drago Jančar, mené tambour battant, est celui des petites magouilles et des grandes désillusions.


Revue de presse :