Coups de cœur Télérama : Andreï Kourkov

Russie

9 juin 2006.
 
© Philippe Matsas/Opale/Editions Liana Levi

La France a découvert Andreï Kourkov avec Le Pingouin, un roman terrible et drôle dont le narrateur cohabite avec un pingouin abandonné par le zoo, et risque sa vie en écrivant à l’avance les notules nécrologiques de personnes qui ne survivent pas longtemps à la rédaction desdites notules…
Ce russe de 40 ans, né à Saint-Pétersbourg, et qui a commencé sa vie d’écrivain (pour la jeunesse d’abord) dans la prison d’Odessa, où il faisait son service militaire, vit aujourd’hui à Kiev, comme Nikolaï le héros de son dernier roman, Le Caméléon. Où Andreï Kourkov puise-t-il donc cet humour ravageur, ce sens de l’absurde ? « Dans les faits divers de mon pays que je me contente de développer », déclare-t-il en toute simplicité. Ainsi Nikolaï se retrouve-t-il embarqué dans une aventure ébouriffante parce que sa curiosité l’a poussé à déchiffrer les annotations inscrites en marge d’un exemplaire d’un chef-d’œuvre caché de la littérature ukrainienne… De la lecture de ces notes à une éprouvante chasse au trésor, il n’y a qu’un pas et quelques milliers de kilomètres que notre héros franchit allègrement. En chemin, il trouve l’amour d’une Kazakhe, un caméléon porte-bonheur et quelques drôles de personnages qui deviennent des alliés parfois, ses ennemis souvent. Pas l’ombre d’une morale derrière ce récit qui flirte avec le surréalisme et les Pieds Nickelés. Il n’y a ni de vrais bons ni de vrais méchants. Tout juste quelques paumés et quelques roublards. « Comme dans la vraie vie », insiste Andreï Kourkov, qui tient à spécifier ici que « ces éléments que vous, Occidentaux, trouvez surréalistes dans mes romans ne sont, en réalité, que des faits complètement normaux dans la société post-soviétique d’aujourd’hui ».
Michèle Gazier

Le Caméléon, traduit du russe par Christine Zeytounian (Editions Liana Levi, 2001)

 

DERNIER OUVRAGE

 
Romans

Les abeilles grises

Liana Levi - 2022

Dans un petit village abandonné de la « zone grise », coincé entre armée ukrainienne et séparatistes prorusses, vivent deux laissés-pour-compte : Sergueïtch et Pachka. Désormais seuls habitants de ce no man’s land, ces ennemis d’enfance sont obligés de coopérer pour ne pas sombrer, et cela malgré des points de vue divergents vis-à-vis du conflit. Aux conditions de vie rudimentaires s’ajoute la monotonie des journées d’hiver, animées, pour Sergueïtch, de rêves visionnaires et de souvenirs. Apiculteur dévoué, il croit au pouvoir bénéfique de ses abeilles qui autrefois attirait des clients venus de loin pour dormir sur ses ruches lors de séances d’« apithérapie ». Le printemps venu, Sergueïtch décide de leur chercher un endroit plus calme. Ayant chargé ses six ruches sur la remorque de sa vieille Tchetviorka, le voilà qui part à l’aventure. Mais même au milieu des douces prairies fleuries de l’Ukraine de l’ouest et du silence des montagnes de Crimée, l’œil de Moscou reste grand ouvert…

Traduit du russe (Ukraine) par Paul Lequesne.