Faire chauffer l’eau, ébouillanter la théière, laver et éplucher les feuilles de menthe, infuser le thé. Mohamed Naote, 27 ans, répète consciencieusement les mêmes gestes depuis plus de dix ans. « Thé man », comme l’ont surnommé les gars de sa cité, distribue deux ou trois fois par semaine du thé à la menthe aux jeunes et aux moins jeunes du quartier Pablo-Picasso, à Nanterre. Depuis des années, il fait la tournée des barres d’immeubles dans ce quartier dit sensible, où les substances illicites sont plus souvent légion que le thé à la menthe. Mais Mohamed fait mentir tous les clichés. Pourtant, la vie ne lui a pas fait de cadeau. Sa mère partie vivre ailleurs trop tôt, un père démissionnaire, il a été livré à lui-même très jeune. Alors, à 16 ans, quand son oncle lui suggère d’aller vendre du thé en bas de son immeuble, lui qui n’est pas franchement brillant à l’école mais bourré d’énergie et d’enthousiasme, se lance. Pour se faire un peu d’argent de poche, au départ, et aussi pour s’occupe