Les Grands débats

De plus intime, à l’occasion de petits déjeuners ou d’apéros du soir, aux grandes après-midi thématiques mêlant débats, lectures et films, rencontres, cafés littéraires, Saint-Malo, le temps du festival, bourdonne comme une ruche. Parce que la littérature est une fête, une école de liberté, un bonheur partagé. Impossible de tout citer, ailleurs que dans la grille horaire ! Quelques moments cependant, salle Maupertuis et ailleurs.

J’AI CHOISI LE FRANÇAIS
Avec Miguel Bonnefoy, Fouad Laroui, Teresa Cremisi, Kamel Daoud, Saïdeh Pakravan
Ils ont, pour des raisons diverses, choisi d’écrire en français. Qu’engage pour chacun le fait de rompre, un jour, avec la langue des siens, langue maternelle, langue nationale ? De se rendre, quelque part, ce faisant, étranger à soi-même ? Ou, autrement dit, de se faire traducteur de soi- même ? D’habiter, en quelque sorte, une sorte de frontière incertaine et mouvante ? De se vivre même peut-être comme double ? Et que reste- t-il de la langue d’origine – une musique, des manières d’être, de penser, de sentir ? Enfin, n’est-ce pas là une expérience qui s’apparente au mouvement même de l’écrivain – d’éprouver l’autre, en soi ?

  • Dim. 14h, Maupertuis

ÉCRIVAINS, POÈTES, QUE TRADUISENT-ILS ?
Avec Jill Silberstein, Patrick Deville, Henriette Walter Admettons, un instant, que le poème, que nos fictions disent quelque chose qui ne peut pas se dire autrement – après tout, ils disent bien quelque chose : ils nous seraient, sinon, indiffé- rents. Mais qui ne peut se dire autrement – qui est donc intraduisible dans sa propre langue. Dès lors, qu’engage la traduction ? Et qu’est-ce que le romancier, dans le jeu de ses fictions, le poète dans sa musique mystérieuse, ses rythmes et ses silences, s’efforcent de faire advenir, de traduire dans leur propre langue ?

  • Lun. 15h45, Maupertuis

PEINDRE, ÉCRIRE : L’IMAGINATION CRÉATRICE
Avec Hubert Haddad, Breyten Breytenbach, Muriel Barbery, Frankétienne
Peinture et littérature entretiennent depuis long- temps des relations étroites. Pour Plutarque « La peinture est une poésie muette, la poésie est une peinture parlante » – des « jumeaux d’élection » pour Horace. Et de fait, elles n’ont cessé de se faire face, de s’éprouver l’une l’autre, comme si chacune tenait le mystère de l’autre Deux miroirs d’un « réel » ? Ou bien se retrouvent-ils en ceci que l’une tente de rendre l’invisible, l’autre l’indi- cible ? Puissances de l’imagination créatrice

  • Dim. 17h45, Maupertuis

PASSEURS DE MÉMOIRE
Pour Antoine Agoudjian, photographe, il s’agis- sait d’abord de retrouver les traces d’une histoire enfouie, écrasée sous le poids énorme du silence. Puis la quête est devenue exploration de soi : pour rendre le réel ajoute-t-il, « il faut être plein du roman que l’on veut écrire à son contact ». L’œuvre du Chilien Patricio Guzmán, Ours d’argent à Berlin pour le Bouton de nacre, est une lutte contre « l’effacement de la mémoire » : un pays ne peut se construire qu’en se mettant au clair avec son histoire. Dans Blue Book, récit du génocide par les Allemands des Hereros et des Nama en 1926 dans l’actuelle Namibie, Elise Fontenaille-N’Diaye recoud, avec le fil de l’ima- gination, l’étoffe trouée d’une histoire mitée par l’oubli. Et pour Simone Schwarz-Bart c’est tout à la fois la mémoire de sa relation avec André, son mari, qui se prolonge dans l’écriture de L’ancêtre en Solitude et celle de la mulâtresse Solitude, quand elle imagine le destin de trois générations de femmes qui lui succèdent.

  • Lun. 12h, Maupertuis

VILLE MONDE, VILLE ROMAN
Villes-monde, villes monstrueuses, sans plus de centre ni de limites, cratères en éruption dans le tohu-bohu des identités confrontées, mêlées, brisées, réinventés, mais centrales d’énergie tout aussi bien, réinventant des mondes, des manières d’être, des civilités nouvelles, où se croisent, s’opposent, s’affrontent des destinées, qui vaille que vaille tisseront ensemble une histoire : la ville n’est-elle pas l’espace romanesque par excellence ? C’est ce que Ray Celestin nous démontre dans Carnaval en récréant une Nouvelle Orléans au bord du chaos, en 1919, Ersi Sotiropoulos, dans la nuit d’Athènes, aujourd’hui (Eva) Parker Bilal (Alias Jamal Mahjoub) dans un Caire bariolé, menaçant, mystérieux, Koffi Kwahulé dans un quartier Saint-Ambroise survolté, à Paris. La ville est un roman. Mais qui mène le jeu ?

  • Sam. 14h, Maupertuis

LE RETOUR DE L’AVENTURE
Avec Riff Reb’s, Jean-Marie Blas de Roblès, Eleanor Catton, Sylvain Coher.
L’aventure est l’essence de la fiction. Quelque chose arrive à quelqu’un : c’est le point de départ obligé. Sans événements, pas de roman. Parce que seuls ceux-ci ont puissance, donnant forme au récit, d’y intégrer des contenus. L’idée saugrenue d’une littérature n’ayant idéalement d’autre objet qu’elle-même s’étant évanouie, revient l’exigence d’une fiction retrouvant la plénitude de ses puis- sances, soucieuse de dire l’inconnu du monde qui vient – aventureuse

  • Dim. 15h45, Maupertuis

AFRIQUE : NOUVELLE GÉNÉRATION
Depuis quelque temps s’impose l’évidence d’une nouvelle génération d’écrivains africains – francophones tout autant qu’anglophones. Et d’une rupture consommée avec les catégories anciennes, héritées des structures traditionnelles comme des luttes anti-coloniales. Taiye Selasi (Le ravissement des innocents) se revendique « Afropolitaine », ni britannique, ni américaine, ni totalement « africaine », mais mobile, d’abord, marquée par les cultures urbaines, active, mul- tilingue – du monde entier. De culture urbaine, pareillement, sont Gauz (Debout-payé) et Fiston Mwanza Mujila (Tram 83). Avec une énergie, des rythmes, une puissance réjouissante. Tous, ils vont faire du bruit !

  • Dim. 17h45, Univers

INVENTIONS DE FORMES
Le retour de la fiction, des pleines puissances d’un roman retrouvant les voies du monde, créant, soulevant des mondes, s’accompagne d’un re- nouvellement des formes littéraires. Comme si le monde en train de naître bousculait tout sur son passage, exigeait des paroles neuves, des voies nouvelles pour se dire, retrouvait aussi les voies anciennes que les idéologies avant-gardistes avaient enfermées au musée – retour en force des puissances à dire la ville, les mondes en gésine, du roman victorien, pour ne citer que celui-là. Énorme bouillonnement dont témoignent les œuvres foisonnantes, audacieuses, d’Eleanor Catton, de Víctor del Árbol, de Jean-Marie Blas de Roblès, de Philippe Bordas.

  • Sam. 15h45, Maupertuis

TOUTES LES NUANCES DU NOIR
Extraordinaire plasticité du roman « noir » ! Chris- tian Roux campe ses personnages de marginaux dans une réalité sociale brute, traversée d’éclairs de poésie, Pascal Dessaint s’intéresse moins aux intrigues policières qu’à la mécanique fra- gile des âmes, dans un Nord dévasté, gangrené par la pollution, où la Nature devient puissance inquiétante, Jérôme Noirez dont le premier titre résume le propos (Féeries pour les ténèbres) place ses romans noirs sous les signes de Love- craft et de Jean Ray, Saul Black, double de Glen Duncan, rôde lui aussi en lisière de fantastique, traquant loups-garous et serial killers.

  • Sam. 10h30, Maupertuis
    Un questionnement que nous retrouverons sur « l’exigence du réel » avec Pascal Dessaint, Syl- vain Pattieu, John King, Anibal Malvar.
  • Lun. 14h, Maupertuis

QUAND LE ROMAN ÉCRIT L’HISTOIRE
Avec Aleksandar Gatalica, Jil Silberstein, José Angel Mañas, Salim Bachi
Une fuite commode dans le passé, inépuisable ré- servoir d’histoires déjà écrites ? Tout le contraire pour les vraies œuvres littéraires : détour, dis- tance nécessaire pour dire l’aujourd’hui, tant il est vrai qu’on ne pose jamais au passé que les questions du présent, pour donner à ce dernier sens et profondeur. Oublions l’exotisme de paco- tille des œuvrettes « historiques » que critiques et historiens accablaient de sarcasmes : partout paraissent des œuvres fortes, puissantes, inter- pellant l’histoire – et les historiens, eux-mêmes s’interrogent, crise oblige, sur les pouvoirs qu’ils négligeaient de la fiction à dire le monde en mutation. Reprocherait-on à Shakespeare et à Tolstoï d’avoir écrit, l’un des pièces, l’autre des romans « historiques » ? Ou bien la fiction dit-elle autre chose ?

  • Sam. 15h45, Maupertuis

JEUX DE CODE
Avec Jonathan Coe, Matthew Mc Bride, Adrien Goetz, Fabrice Bourland
Jonathan Coe, à l’œil aigu de satiriste, qui contemple le monde avec une distance amusée, non dénué de férocité, revisite en virtuose les codes du roman d’espionnage pour dire le monde disparu des années 50 en Angleterre, Matthew McBride, passe « Frank Sinatra dans un mixeur », mais à la manière d’un Mickey Spillane revenu des années glorieuses du roman noir américain, Adrien Goetz invente une nouvelle vie à Arsène Lupin avec une jubilation communicative. Héros immortels, codes narratifs connus de tous en signe de connivence, pur plaisir de la lecture...

  • Lun. 10h, Maupertuis