Le "padre" profite de sa retraite pour bricoler dans son jardin et y accumuler des vieilleries. La mère regrette le bled et trouve ses enfants trop maigres malgré la quantité de nourriture qui trône sur la table. Dounia, la soeur aînée, est une féministe engagée. Mina, la cadette, rougit au moment de la publicité pour le gel douche. Et le frère ? Mourad se sent partagé entre son désir de liberté et son pire cauchemar, celui de devenir un vieux garçon obèse aux cheveux poivre et sel se noyant dans de l’huile de friture. Son refuge à lui, ce sont les livres. Après un départ théâtral et dix ans d’absence, Dounia réapparaît un jour, les cheveux courts et les dents qui rayent le parquet, elle se lance en politique. Mourad sait d’autant moins comment recoller les morceaux qu’il est nommé professeur stagiaire à Montreuil dans le 93, très loin de Nice où réside sa famille. Ses élèves qu’il met en garde contre les clichés lui parlent de leurs potes de "Cliché-sous-Bois", certains le voient comme le messie, d’autres se battent les "yeuk" de son autorité… Hébergé dans les beaux quartiers chez Miloud, un cousin gigolo qui se saoule au raï, Mourad ne sait plus très bien où il en est. Tout le monde conspire à l’arracher à ses livres... La seule chose dont il est sûr, c’est qu’un homme, ça ne pleure pas. C’est ce que le padre lui a appris. Se glisser dans la peau d’un garçon qui n’aspire qu’à la paix permet à Faïza Guène de prendre à rebours toutes les idées reçues sur cette France "issue de l’immigration" dont elle est devenue, dès le succès phénoménal de son premier roman Kiffe kiffe demain (Hachette littérature, 2004), une des voix les plus originales.