On ne sait jamais trop, d’une année l’autre, quand défile le carnaval chinois dans le quartier de Saint-Ambroise, entre la place Léon-Blum et le boulevard Richard-Lenoir. C’est en tout cas l’hiver, un jour de janvier ou février. Et c’est là que tout advient.
C’est ce jour-là, au milieu des couleurs criardes, au son des gongs et des cymbales, que revient le funeste Guillaume-Alexandre Demontfaucon, alias Nosferatu, individu irréconciliable qui prêche même la nuit du haut de son balcon sa haine des Chinois, porté par le souffle de Nabucco à plein volume.
Un jour comme tous les autres pour Ézéchiel qui, depuis la mort de son père, écoute Back to Black en boucle entre les murs de sa chambre. Ézéchiel qui occupe les longues journées qu’il ne passe plus au lycée à « prier », comme il dit, sur fond de fantasmes flamboyants et débridés. Sa mère, femme ardente désormais absente à tous comme à elle-même, fait une fois de plus semblant d’aller travailler. Sora’shilé, la grande sœur qui maintient le lien comme elle peut, continue pour Ézéchiel le récit de sa vie perchée « dans une cabane dans les arbres ». Tandis que l’imprévisible Melsa Coën, « jolie liane noire souriante », s’empare peu à peu des rêveries d’Ézechiel.
Jusqu’au jour où Ézéchiel sort enfin de chez lui…
Dans ce roman qu’on croirait écrit dans l’énergie syncopée de l’improvisation, tout commence par le rythme, dans le grand balancement du désir et de la répulsion qui porte les personnages de cette nouvelle dramaturgie urbaine.